mercredi 27 février 2008

Laos - Why are you travelling ?

Muang Ngoi

Inde du nord, Londres, Thaïlande, Laos, Cambodge, cinq destinations, cinq Lonely Planet. Depuis mon départ, ce guide de voyage m’accompagne dans mes découvertes. Historique du pays, descriptions des us et coutumes, cartes détaillées, infos pratiques, c’est un outil drôlement bien fait. Pas étonnant qu’il soit si populaire à travers les voyageurs du monde entier. On peut presque parler d’un monopole planétaire. Les traductions sont innombrables : anglais, français, allemand, espagnol, italien, hébreux, chinois… Beaucoup de voyageurs l’utilisent. Évidemment, ce phénomène a d’énormes répercussions sur le terrain. Les Guest Houses recommandées augmentent leur prix et affichent tout de même complet. Ceci est un moindre mal car nombreux sont les établissements de qualité équivalente qui ne s’y retrouve pas. Le plus grand désagrément, c’est que tous les voyageurs font sensiblement le même trajet. Le village décrit comme étant calme et paisible ne le sera pas longtemps. Heureusement, l’éloignement de certains lieux les préserve d’un trop grand achalandage. C’est le cas de Muang Ngoi, au nord du Laos. Petit bled sur la rivière Nam Ou où nulle route ne se rend. Mon Lonely décrivait l’endroit de village idyllique où les voyageurs venus pour deux ou trois jours finissent par s’y attarder plus longtemps…



Départ de Nong Khiaw à 14h, le bateau est plein à craquer (littéralement!). Une bonne vingtaine de touristes, jeunes backpackers comme moi entassés en deux rangées, une face à l’autre. Au niveau confort, on repassera ! Mais cette proximité est propice aux rencontres. En quelques instants, je fais connaissance avec plusieurs d’entre eux. Les inévitables et pratiques questions : « Where are you from? », « Where have you been?”, “For how long are you travelling for?”… Aurélia de France, Marcus, Armin et Irene d’Italie, Marion, Linda et Kathrin d’Allemagne…



C’est ainsi que j’ai fait connaissance avec Tom, un Australien de Brisbane. Celui-ci se démarquait déjà des autres de par sa quatrième question : « Why are you travelling? ». Wow ! Quelle belle question. Ça peut paraître simple, mais la réponse à cette question vous en dira beaucoup plus long sur le voyageur qui a devant vous que les trois autres questions réunies. Avant même de répondre à la hâte une connerie du genre : « Pour satisfaire ma curiosité », je l’aimais déjà ce type. La discussion qui s’en suivit fut particulièrement intéressante. Elle fut toutefois écourtée par notre arrivée à Muang Ngoi.

Les voyageurs se séparent, espérant trouver la perle : un bungalow avec un hamac confortable et une vue sur la rivière. Aurélia et moi partons de notre côté, elle m’a demandé si je voulais partager l’hébergement. Je spécifie que c’est elle qui a fait la requête car pour des raisons évidentes, il est très mal vu pour un gars de demander à une fille qu’il connaît à peine de partager son lit… Bref, j’ai accepté son offre afin d’économiser quelques milliers de kips (des économies réelles de 1,50$ la nuit…). Après quelques minutes de recherches, nous avons trouvé notre perle. Devinez qui est notre voisin de hamac ? Mr Tom en personne. Une fois installé, je pars à la rencontre du village et de sa rue principale. La rivière, les montagnes, les villageois, tous me souhaitent la bienvenue. Enchanté, je reviens contempler le coucher du soleil, bien assis dans mon hamac. Le séjour commence à merveille !



Je profite de l’occasion pour réfléchir et ainsi répondre plus adéquatement à la question de Tom: « Pourquoi je voyage ? ». Cette réflexion, je la fais d’abord pour moi. On s’arrête trop peu souvent aux vrais motifs de nos actions. Voyager pour moi, c’est la liberté ! Loin de toutes obligations, de tous engagements, de toutes ces contraintes que nos sociétés nous imposent, je me sens libre, je me sens vivant. Je choisis. Je contrôle. Je réalise le rêve de tout prisonnier, je m’évade. Certains diront que je fuis la réalité. Mais qu’est-ce que la réalité ? Et si ce n’était pas ce qui nous arrive mais ce qu’on réalise. Je ne fuis pas la vie, je préfère la créer.



Il est facile d’occuper ses journées à Muang Ngoi. Dès le levé, je m’exerce un peu au bâton de feu. Ensuite, on rejoint les nouveaux amis chez Mr Khan pour une baguette fraîche et un ovaltine tout chaud. Nous avons tout adopté ce resto car même si il faut s’armer de patience, la bouffe est toujours excellente. De toute manière, personne n’a de montre ici, on en profite pour planifier le reste de la journée. Les options sont nombreuses. Faire de longues promenades dans les rizières creusées au fond des vallées. Partir à la rencontre des troupeaux de buffles. Visiter les nombreux villages des alentours et leurs habitants toujours souriants et accueillants. Explorer les profondeurs des grottes armés d’une seule lampe frontale et s’apercevoir que la qualité des trois batteries AAA que l’on vient tout juste de se procurer à cet effet est plutôt douteuse. Tenter sa chance lors d’une partie de pêche traditionnelle.



Toutefois, je vous avouerai que c’est le soir qui constituait mon moment favori. D’abord, le bain de vapeur quotidien et le massage (en option). En plus d’être peu chers et relaxants, ces petits luxes constituaient la seule porte d’entrée à des douches chaudes au village, avantage incontestable quand on connaît la froideur des soirées nord-laotienne. Bien réchauffé, je rejoins à nouveau les amis chez Mr Khan pour le souper. Assis tous autour d’une immense table, on discute, on échange, on rit, on finit par manger notre ration de riz collant, on boit de la Beerlao (excellente en passant!) et du LaoLao (cette fois, je passe mon tour sur ce puissant alcool de riz). Bien réchauffés, nous partons pour une plage reculée ou nous attends notre joli feu de camp. La, c’est l’apothéose. Les nuages qui descendent dans vallée donnent aux montagnes des formes étranges (à titre, d’exemple : un gorille qui s’en va en Russie…). On entend des centaines de vendeuses ambulantes gratter leur grenouille de bois. Les pieds dans le sable, la tête dans les étoiles, on communie, on partage le rêve. Immobiles, on voyage ensemble l’espace d’un moment.



Je planifiais rester deux ou trois jours à Muang Ngoi, j’y suis demeuré une semaine. Il faut dire qu’après cinq jours, j’allais quitter l’endroit lorsque j’ai fait la rencontre de Betsy, la superbe américaine. Elle n’a pas eu à me tordre le bras pour me convaincre de rester avec elle. Nous avons donc passé deux jours inoubliables dans ce petit paradis de routards, puis un à Nong Khiaw et un autre à Luang Prabang. Elle repartait pour New York, je devais poursuivre ma route…

Muang Ngoi est presque parfait en lui-même. Toutefois, ce sont les rencontres que j’y faites qui le rendent exceptionnel. Aurélia, Tom, Marcus, Arno, Irene, Katrin, Marion, Linda, Greg, Marie, Oliver, Alex et bien sur Betsy… Voilà autant de raisons pourquoi je voyage. Alors, la prochaine fois qu’un routard me posera la fameuse question : « Why are you travelling? ». Je répondrai : « Pour te rencontrer »

mercredi 20 février 2008

Laos - Photos - Luang Prabang

Luang Prabang


La ville





La chute de Tat Kuang Si





Marché de nuit





Le singe cleptomane

dimanche 17 février 2008

Laos - Photos - Deux jours sur le Mékong

Pak Beng


Le fleuve





Les bateaux





Les gens





La nuit

vendredi 15 février 2008

Laos – Photos - Trekking à Vieng Phukha

Vieng Phukha


École d’un village





Village de montagne, tout simplement splendide !

jeudi 14 février 2008

Laos - Une faim de loup !

Vieng Phukha

On raconte que le Laos ressemble à la Thaïlande d’il y a trente ans. Plus sauvage, plus intacte, plus authentique. Premier constat en entrant à Vieng Puckha, les habitants sont chaleureux, accueillants, souriants, attachants, les enfants nous envoient la main en criant « Sabadi » (Bonjour). La femme qui travaille à notre Guest House est d’une amabilité sans borne. Elle ne comprend pas l’anglais mais elle comprend tout le reste ! Tout juste descendus de l’autobus, nous lui commandons un repas, du poisson pour les uns, du poulet pour les autres (le « nous » désignant les trois filles de Montréal et moi). Aussitôt fait, elle enfourche sa motocyclette en direction du marché du village.

Dix ou quinze minutes plus tard, elle revient avec un panier d’osier sous le bras. Elle nous explique qu’il n’y a plus de poisson. Soit, ce sera du poulet pour tout le monde ! Soulagée par notre nouveau choix, elle ouvre son panier duquel elle sort une poule ligotée et bien vivante. Nous nous regardons tous d’un air amusé, le repas sera frais ! Ce n’est pas tous les jours que l’on fait connaissance avec sa nourriture. Curieux et fasciné, je n’ai pu m’empêcher de suivre la dame jusqu’à l’arrière de la petite cabane, faisant office de cuisine. Là, simplement, naturellement, j’ai vu la poule mourir frénétiquement, puis lentement, pendue au bout d’une corde. J’étais tout de même soulagé de ne pas avoir commandé du porc… On est décidemment plus en Thaïlande !

Notre rencontre avec le Laos s’est poursuivi en soirée. Nous marchions tranquilles, les trois filles et moi, venant tout juste de s’inscrire pour un trek, lorsque devant nous, en plein village, un immense buffle était couché sur son flanc, les quatre pattes ligotées ensemble et liées à un arbre. Des villageois, petits et grands, étaient là, tout autour. Le funeste sort de l’animal était connu de tous, tous sauf le principal intéressé ! J’imagine que ce n’est qu’une fois le couteau enfoui dans la gorge que la bête réalisa la gravité de la situation. Il était déjà trop tard, impuissante, elle n’eut qu’un seul réflexe, celui de beugler lourdement sa peur et sa douleur. Heureusement pour nous, mais surtout pour elle, l’agonie de la bête s’est fait plus courte qu’elle n’a semblé. La mort et la douleur modifient notre rapport au temps. Je ne sais pas si pendant ce court instant, le fil de sa vie lui a défilé devant les yeux mais je peux parier que ce moment lui a paru une éternité. A-t-il vu le tunnel lumineux ? A-t-il rencontré Saint-Pierre version bovine ? Quels péchés peut-il bien avoir commis pour se mériter l’enfer ?

Je m’aperçois que la douleur et la mort créent en nous un malaise. Pour soulager cet inconfort, il existe plusieurs solutions : l’humour (l’option utilisée par le narrateur), la fuite (l’option utilisée par le personnage). Devant tout ce sang versé, je m’éloignais, riche d’une nouvelle expérience culturelle, d’une nouvelle source de réflexion, d’une nouvelle anecdote pour mon blog ! Bienvenue au Laos !

Comme le dit le vieux dicton lao : « jamais deux sans trois! ». Un autre choc nous attendait lors du trekking du lendemain. Nous marchions depuis déjà toute la matinée (le nous étant le même que dans l’histoire précédente). Affamés, nous arrivions justement au village où nous devions nous arrêter pour une pause repas. Dernier obstacle à franchir, une rivière. Trekkeurs aguerris que nous sommes devenus, l’on retire nos chaussures et chaussettes pour traverser pieds nus le cours d’eau. De l’autre côté, un groupe d’hommes pouvaient apprécier le gracieux spectacle du falang tentant de tenir son équilibre avec ses chaussures dans la main droite et essayant sans trop de succès de retenir ses pantalons préalablement roulés au dessus de ses genoux. Cette scène ridicule avait certainement de quoi les amuser tous.

Après le « Sabadi » d’usage, je me penchais pour remettre mes bottines. C’est alors que j’ai vu sur le sol de grosses tâches de sang, un sang d’une couleur si vive qu’il ne pouvait qu’être tout frais. Peu étonné, probablement habitué aux méthodes culinaires laos, je remontai du regard la piste sanglante. C’est alors que je compris que ces hommes ne constituaient pas un comité d’accueil mais s’affairaient autour d’un barbecue. Ça tombe bien, j’avais justement une faim de loup ! « Qui a-t-il au menu ? » demandais-je à mon guide. Après avoir interrogé le cuisinier, il me répondit « duck ». Hummm, ça l’air délicieux. En m’approchant doucement, je me rappelai de deux choses importantes. La première : même au Laos, les canards n’ont pas quatre pattes et d’aussi grosses canines… La seconde : les laos peuvent parfois intervertir les sons les sons « k » et « g ». Mais où s’est enfui l’appétit qui me tiraillait il y a à peine une seconde ? Il faut croire que certaine vision n’inspire pas mon estomac. La vue du meilleur ami de l’homme embroché et cuit sur le feu est l’une d’elle… À propos, qu’est-ce qu’on mange ? Heureusement, ce repas n’est pas pour nous. Heureusement, le Laos est bien différent. J’aime la différence, j’aime le Laos ! J’aime aussi les chiens, mais pas à n’importe quelle sauce.



Je préfère avertir les cœurs sensibles que les deux photos trouvées un peu plus bas sont crues et témoignent d’une réalité que nous, occidentaux urbains, sommes rarement ou presque jamais confrontés. À vous de décider...















lundi 11 février 2008

Miss Thaïlande, je t’aime mais tu es trop facile…

Chiang Khong

Ce n’est avec aucun regret que je quitte Miss Thaïlande. Ne vous trompez pas ! Une relation d’un mois et demi n’est pas viable sans y prendre plaisir. Elle a beaucoup à offrir, elle est très riche et ce, à plusieurs niveaux. Elle est d’abord prospère économiquement. Les infrastructures gouvernementales sont extrêmement bien développées : hôpitaux, écoles, routes. La Thaïlande n’est pas ce que j’avais imaginé. Les Thaïs sont en santé, éduqués et fortunés. Pas étonnant qu’ils soient fiers de leur pays et de son succès. Le royaume est tapissé du drapeau national. Même les américains font piètre figure à côté. La Thaïlande aurait-elle inspirée ces messieurs du scandale des commandites ?

Miss Thaïlande est riche. La prospérité du pays, les Thaïs semblent l’attribuer à leur roi bien aimé, Rama IX. Cet homme, que dis-je, ce dieu vivant à tous les talents : ce scientifique, cet homme de lettres, ce musicien, cet artiste, ce photographe, cet ingénieur… Le pays est couvert de son effigie. Il est tout simplement partout, dans toutes les demeures, devant tous les édifices publiques, aux coins des rues, partout… La sœur du roi est décédée depuis bientôt deux mois. Le peuple est en deuil. À travers tout le royaume, on retrouve en son honneur des sanctuaires improvisés flanqués de draps noirs et blancs. À la télévision, on passe en boucle une rétrospective de la vie de la dite dame. Toute cette mascarade n’est qu’un pâle exercice préparatoire, une répétition générale. Le roi prépare déjà sa propre sortie. Elle sera grandiose, vous pouvez compter sur lui… Surtout, n’en dites rien à personne, cette idée, véritable crime de lèse-majesté pourrait me coûter sept ans d’emprisonnement. Ici, on ne rigole pas avec la royauté.



Miss Thaïlande est belle, elle s’ouvre au monde, c’est magnifique dans un certain sens. Cependant, vous le savez tous, la Thaïlande se prostitue. Combien de falangs (étrangers) ai-je vu aux bras de jeunes et jolies Thaïes. Des couples aux allures tellement artificielles, ça sent l’exploitation à plein nez ! Cette odeur me rend mal à l’aise. Qu’est-ce qui me perturbe tant ? Après tout, je suis d’avis que le plus vieux métier du monde ne cessera jamais d’exister et qu’il devrait être reconnu et contrôlé. Ce qui pue ici, c’est que la prostitution semble rimer avec colonisation et exploitation. En vérité, ce n’est pas si simple. Le regard que je porte sur la situation est bel et bien celui d’un occidental. Il semblerait qu’en Thaïlande, la prostitution est vue bien autrement. Elle fait partie de la culture. Saviez-vous que 80% des clients sont d’origine thaïe ? Les falangs viennent tout simplement profiter un système déjà bien implanté. Peu importe l’origine, je sens un malaise.



Miss Thaïlande est ouverte sexuellement. Les ladyboys (1) sont légion. Y’en a-t-il vraiment plus que chez nous ? Difficile de dire car la tolérance fait probablement en sorte qu’il y en a beaucoup plus qui s’affichent. Les mœurs sexuelles peuvent elles aussi différer de chez nous. À Bangkok, l’homme qui va se faire masser en compagnie de sa femme se fera systématiquement proposé le fameux « happy finish ». Pour eux, il ne s’agit pas d’un acte sexuel mais d’un simple massage. Disons que les épouses occidentales voient la chose un peu différemment…

Miss Thaïlande, tu es trop facile. Après l’Inde, tu m’as apparu un peu terne, presque trop facile, trop propre, trop peu différente de la maison. Les innombrables Seven/Eleven procurent aux étrangers le beurre de peanut, les Kit-Kat, les Fruit Loops et autres denrées bien de chez nous. Il est facile d’y succomber. Je prie presque tous les soirs pour que le Laos ne vende pas de biscuits Oréo…

1: Un ladyboy, c'est le terme employé en Thaïlande pour décrire un travesti.

dimanche 10 février 2008

Thailande - Naa Phan et les femmes girafes

Chiang Khong

Existe t-il des dragons en Asie ? Voilà ce que je tente de vérifier avec l’aide de mon neveu Vincent. Certains événements récents ont précipité de l’avant les recherches. En effet, il y a plus de quatre semaines, j’ai parlé de ma quête à un vieil homme rencontré dans le village de Mae Sariang, au nord de la Thaïlande. Amusé ou intrigué par mon intérêt pour cet animal légendaire, il m’a offert un bout de papier déchiré sur lequel on pouvait lire de bien drôles de lettres. Il me dit simplement que l’écriture employée est fort ancienne et que le texte me mènerait un peu plus près d’une réponse. Ne faisant ni une ni deux, je demandai de l’aide à Vincent, un jeune et brillant dragonologue. Je lui envoyai donc par courriel le mystérieux texte. Deux semaines plus tard, mon intuition était confirmée, l’alphabet utilisé était celui des dragons et Vincent m’en envoyait la traduction complète. Quelle efficacité !!! Voici ce que le texte raconte :

Dans le village de Mae Hong Son, on raconte qu’une dragonne habite dans les montagnes de la région depuis fort longtemps. Elle s’appelle Naa Phan et elle est d’une beauté exceptionnelle. Plusieurs légendes existent à son endroit. On dit qu’elle est la mère des Padaung, le peuple des femmes girafes. Pour vous y rendre, le chemin est assez complexe mais je peux vous….



Il n’en fallait évidemment pas plus pour que je mette le cap sur Mae Hong Son. Voyageant toujours avec Karine, Annick et Chantal, je n’allais pas vivre seul cette aventure. Pour nous guider à travers la jungle et les montagnes de cette région, nous avons engagé un guide. En discutant de mon projet avec lui, il me dit qu’il connaissait bel et bien ces histoires de dragons et de femmes girafes mais qu’il ne croyait ni à l’une ni à l’autre. Des rêveries de grands-mères disait-il. Malgré tout, il accepta de nous y conduire.

La veille du départ, inquiété par des nuages plutôt gris, je lui demandai si il fallais apporter nos vêtements contre la pluie. Il me réconforta en me disant qu’il ne pleuvait jamais en ce temps de l’année. Je ne sais pas à quoi j’ai pensé, mais je lui ai fait aveuglement confiance…

Après une très belle journée de marche sous un soleil de plomb, nous arrivions à un premier village, notre camp de base pour notre expédition. Sans trop de succès, j’ai tenté de faire quelques portraits d’enfants. Les habitants semblent plutôt réservés dans la région. Le soir venu, autour du feu, notre guide nous expliqua qu’il avait fait sa petite enquête auprès des villageois. Ces derniers lui avouèrent qu’ils n’avaient jamais osé pénétrer dans le territoire de la belle et puissante Naa Phan. Ils lui révélèrent tout de même les indications pour y parvenir. Pour conclure, les habitants nous conseillèrent de brouiller nos pistes en faisant un bout de chemin à dos d’éléphant. Génial ! Une promenade dans la jungle sur Dumbo, l’aventure se poursuit à merveille.



Le lendemain matin, dès le réveil, j’ai vite compris que la journée allait être longue et pénible. Il pleuvait abondamment. À cet instant, je regrettais amèrement de ne pas avoir apporté mon coupe-vent. Partout au village, le sol était boueux et glissant. Les déplacements allaient être difficiles. Tout à coup, la ballade à dos d’éléphant ne semblait plus aussi magique. Juchés sur le mastodonte, Chantal et moi étions fort inconfortablement assis. L’inconfort provenait de plusieurs facteurs. Évidemment, la pluie. Trempés et immobiles, la chaire de poule et la mâchoire qui claque, mon corps m’envoyait des signaux plutôt clairs. L’inconfort venait aussi du siège. Mes articulations me le confirmaient, les petits bancs en bois n’étaient pas conçus pour les falangs de grandes tailles. Finalement, il est difficile de se sentir totalement à l’aise lorsqu’on est perché à cinq mètres du sol sur un animal aussi lourd. La bête, hésitante devant chaque dénivelé, n’appréciait pas les conditions routières. C’est tout juste si on ne voyait pas un panneau arborant deux traits en « S » surmontés d’un éléphant. Parfois, le pachyderme glissait, mon cœur arrêtait soudainement de battre pendant quelques secondes. Si il fallait que l’éléphant se renverse sur le dos, l’ambassade canadienne aurait beaucoup de boulot afin de retirer nos corps enfouis sous une tonne de boue.



Il n’avait qu’un seul moyen d’échapper à cet inconfort : penser à autre chose. Chantal et moi discutions donc de n’importe quoi pour nous changer les idées : le boulot à la maison, les quiz télés, les potins artistiques. Bref, de quoi nous occuper l’esprit ! Finalement, après près de deux heures, notre calvaire était terminé. La jungle se faisant de plus en plus dense, les éléphants ne pouvaient aller plus loin. La distance nous séparant du village allait se faire à pieds. Cela constituait une merveilleuse nouvelle car qui dit marche, dit effort physique, dit réchauffement du corps.

Tel que prévu, bien que toujours trempé jusqu’aux os, la température corporelle augmenta rapidement. C’était maintenant notre tour d’être hésitants face aux pentes abruptes. L’accumulation de boue sous nos chaussures en augmentait sensiblement le poids et par extension l’effort physique déployé à chacun des pas. Nous avons donc progressé lentement pendant de longs kilomètres. Mais tous ces efforts ont été récompensés. Sur le chemin nous avons trouvé un immense tas de merde !!! Fort de la mauvaise expérience indienne, j’utilisai avec prudence mon thermomètre afin de relever la température de cette impressionnante fiente. Le résultat s’est avéré bien proche de celui de Dharamsala : 61 degré Celsius. L’analyse future de ces données me révélera peut-être de nouveaux indices J’en profite d’ailleurs pour demander à Vincent s’il peut investiguer davantage sur la signification de ces résultats.



Peu de temps après cette découverte, nous sommes arrivés au mystérieux village de Mae Hong Son. Nous y avons rencontré les fameuses femmes girafes, celles qui sont, d’après la légende, les filles de la belle Naa Phan. Compte tenu que nous ne connaissions pas exactement leur relation avec la dragonne, notre guide a cru bon de rien dire de nos intentions dans la région. Ce peuple d’une extrême gentillesse nous a invité à dormir avec eux pour la nuit. Nous étions les premiers étrangers à visiter leur bourgade depuis fort longtemps.



Le lendemain matin, après quelques photos de ces femmes girafes, nous avons mis le cap sur les montagnes des alentours. Nous nous sommes d’abord dirigés vers un pic à la forme étrange. Après tout, les dragons n’ont sûrement pas l’habitude d’habiter de banales collines. Nous avions vu juste car à peine à mi-chemin du sommet, nous arrivions à l’entrée d’une gigantesque grotte. La cavité était énorme, je n’avais jamais rien vu de tel. Un petit temple décoré d’un bouddha doré trônait au centre. Des dizaines d’offrandes de toutes sortes avaient été déposées tout autour. À qui étaient destinés tous ces cadeaux ? J’avais bien évidemment une idée là-dessus, mais je ne voulais pas sauter trop vite aux conclusions. Armés de nos lampes frontales, nous nous sommes enfoncés dans les ténébreux couloirs. Je dois vous avouez que le niveau d’adrénaline était à son comble.



Aussi étrange que cela puisse paraître, j’étais excité et non pas apeuré. À travers toutes les légendes, Naa Phan n’a jamais vraiment montré d’agressivité contre les humains. Comme la plupart des dragons, elle protège son trésor des voleurs. Ce sont uniquement ces derniers qui doivent redouter son courroux, pas les petits aventuriers comme moi qui ne cherche qu’à vérifier son existence. Pour échapper aux ennuis, les dragonologues savent bien que l’on doit éviter à tout prix de prendre les dragons en photos. Vincent m’a souvent expliqué qu’ils ont horreur de cela. Comme je tiens à la vie, j’ai pris la sage décision de respecter cette règle. Je ne voudrais surtout pas conclure hâtivement ce périple en Asie en faisant l’objet d’un barbecue.



Quoi qu’il en soit, je n’ai pas pris de photos car tout simplement je n’ai rien vu qui puisse ressembler à un dragon. J’aurais bien aimé vous dire que j’y ai rencontré la légendaire dragonne mais je ne pousserais pas l’audace jusque là… La grotte quoique spectaculaire était bel et bien vide lors de notre passage. Naa Phan n’était donc pas à la maison. C’est normal après tout, elle était peut-être au boulot, en vacances, à l’épicerie, chez le dentiste… Avec un peut d’imagination, les possibilités sont infinies. Il ne faudrait tout de même pas en tirer des conclusions hâtives. L’absence de preuve ne signifie pas la preuve de l’absence. Je poursuivrai mes recherches à travers les prochaines contrées à parcourir. Cette enquête, tout comme mon périple asiatique, me prouve une chose, le plaisir réside rarement dans l’atteinte de l’objectif ou de la destination, le bonheur se trouve plutôt sur le chemin, comme dans la chanson de Félix...

samedi 9 février 2008

Thailande - Les échos de frérot

Pai

Cinq mois déjà! D’un jour à l’autre, d’une ville à l’autre, à la fois coupé de la réalité et en plein dedans. Si ce n’était de l’Internet, je me sentirais complètement isolé du monde. Bhutto assassinée, Castro terminé, Sarko et Carla mariés … Ce n’est pas toujours l’essentiel qui nous parvient. De toute façon, voyager pendant des mois transforme notre perception de l’essentiel. Ironiquement, quand on parcoure la planète, les nouvelles internationales perdent un peu d’intérêt. Naturellement, quand on se ballade loin de chez soi, ce sont les échos de notre entourage qui nous emballe le plus. La mort de Sushi, le doux visage de Jeff atrocement lacéré, les exploits de Seb à Paléogénies, la castration de Kozak, le voyage de Benoit en Argentine, l’attaque des pirates informatiques japonais, Juju qui patine, la médaille d’argent de Vincent aux échecs...

Parmi ces petites anecdotes du quotidien, il y a des nouvelles qui m’ont fait particulièrement plaisir. Des nouvelles d’un être cher, une personne très proche mais qui malgré tout a toujours représenté un véritable mystère. Frédéric, je ne sais même pas si tu lis mes textes. Si c’est le cas, sache que je pense très fort à toi et que les nouvelles qui me parviennent à ton sujet me vont droit au cœur. Je suis si fier de toi car il semblerait que tu as retrouvé ton chemin vers un plus grand bonheur, celui que l’on cherche tous un peu. Je sais trop bien qu’il n’appartient souvent qu’à nous pour être heureux. C’est à nous de se préoccuper de notre bonheur, sinon qui le fera? D’ici mon retour, j’espère recevoir d’autres nouvelles de toi ! Je les attends avec impatience.

Deux frères, ça ne se le dit pas souvent mais je t’aime et j’ai très hâte de te revoir.

Olivier

mardi 5 février 2008

Thailande - Photos - Souvenirs d'enfance

Mae Hong Son

Le projet Souvenirs d'enfance s'est poursuivi en Thailande. Malgre les quelques doutes du passe, je crois que cela vaut vraiment la peine. A vous de juger des resultats...



Quelques photos supplementaires

lundi 4 février 2008

Thailande - Photos - Mae Hong Son

Mae Hong Son

Mon coup de coeur du nord de la Thailande.



Une ballade a moto pres de la frontiere birmane. La Chine n'est vraiment plus tres loin.

samedi 2 février 2008

Thailande - Akobomo

Pai

On ne peut venir dans le nord de la Thaïlande sans faire un trek ou deux. La formule est souvent la même : promenade dans la jungle à travers les collines, visite de villages, rencontre avec les différentes ethnies, soirée et nuit chez l’habitant, ballade à dos d’éléphant en option, tout ça répartis sur deux ou plusieurs jours. Les treks se ressemblent tous sur papier mais les expériences varient beaucoup, dépendamment du guide et des tribus rencontrées. À Pai, j’ai décidé de tenter l'aventure. Le moment était bien choisi car le village qui allait m’héberger s’apprêtait à célébrer la venue du nouvel an les chinois (la Chine n’est pas très loin de cette région et les peuples montagnards en sont issus). La première journée de marche, je l’ai faite seul avec deux jeunes guides. Je ne vous apprends rien, les tribus montagnardes habitent les montagnes… Ne soyez pas surpris si pour s’y rendre il faut grimper. L’ascension est d’autant plus pénible à cause de l’étouffante humidité. Heureusement que l’on traversait régulièrement un petit ruisseau qui me procurait un rafraîchissement bien apprécié. Se préoccupant également de mon estomac, le plus attentionné des guides m’offrit en guise de collation un joli petit « Bamboo worm » bien dodu. J’ai toujours pensé que le premier insecte que j’allais ingurgiter de manière consciente allait être cuit, par conséquent mort. Je m'étais trompé ! Qui aurait cru qu'un ver cru avait le goût de melon d'eau ???



Finalement, nous sommes arrivés au village niché dans le fond d’une petite vallée. On pouvait dénombrer une quarantaine de maisons dans ce minuscule hameau, aucune rue digne de ce nom et pourtant la circulation était dense. Les truies suivies de leurs porcelets, les chiens suivis du pied de leur maître, les poules suivies de leurs poussins ainsi que d’un coq un peu trop entreprenant… À tout ça s’ajoute les nombreux enfants qui, tout comme leurs homologues indiens le font à l’occasion de Diwali, font exploser des pétards, des bombes, la vallée toute entière résonne sous les détonations et les rires de gamins.



C’est dans ce joli petit village que j’ai fait la rencontre du groupe de randonneurs occidentaux auquel j’allais me greffer pour le reste de l’aventure. Il y a d’abord Jeannette, une danoise d’une cinquantaine d’années; Jenny, une jeune suédoise et Alex, un anglais de mon âge. Après les présentations d’usage et un court repos, nous étions invités chez un habitant qui voulait partager le repas avec nous. Avant de quitter notre hutte, Mr Cha, notre guide nous avertissait que la politesse veut que nous acceptions tout ce qu’il peut bien nous offrir, ne serait ce qu’en petite quantité. J’ai déjà entendu paroles plus rassurantes…



En entrant dans la demeure, notre hôte nous fait signe de nous asseoir par terre autour d’une petite table basse. Contrairement à la norme thaïlandaise, nous n’enlevons pas nos chaussures car il n’y a pas de plancher, le sol est fait de terre battue. Des dizaines d’épis de maïs et des morceaux de viande sèchent accrochés aux poutres, on se croirait presque dans une maison longue iroquoïenne. Sans jamais se joindre à nous, notre hôte nous a apporté de la nourriture : riz collant, légumes, porc et j’aurais dû m’en douter, du whiskey local. Cet alcool fait maison est généreusement offert dans de grands verres. Notre guide nous a dit que le dit breuvage comporte entre 70 et 80% d’alcool. Mon nez, ma langue ainsi que ma gorge s’entendaient tous pour dire qu’il est homme de parole et qu’il serait plus doux de boire de l’alcool à friction. Heureusement, notre hôte n’a pas trop insisté pour que l’on boive le second verre qu’il nous avait offert. Peut-être savait-il que nous devions partir assez tôt car d’autres villageois espéraient avoir l’honneur de nous accueillir chez eux. Il était à peine 18h, la soirée ne faisait que débuter.



De maisons en maisons, un peu de riz ici, un peu trop de whiskey par là, à ce rythme, je ne verrai jamais arriver l’année du rat ! Je vous avouerai tous qu'à un certain point, peut-être la neuvième ou dixième demeure, je ne faisais plus que tremper mes lèvres dans cet infâme breuvage. Après tout, il fallait bien tenir debout pour danser avec les villageois toute la nuit durant. Après notre tournée, nous avons regagné notre maison pour le souper… Pas besoin de vous mentionner l’état de mon appétit. J’étais pourtant bien content de faire cette petite pause, mon taux d’alcoolémie en avait bien besoin. Une heure plus tard, on venait nous chercher, les cérémonies marquant le nouvel an débutaient. En sortant à l’extérieur, j’ai été frappé par la beauté du ciel. C’est comme si, le temps d’une nuit, les étoiles des deux hémisphères s’étaient réunies au dessus de nous et ce, spécialement pour la fête.

Les villageois avaient temporairement planté un arbre, symbole de renouveau, devant chaque maison. Une vingtaine de personnes, surtout des enfants, dansaient tout autour en suivant deux musiciens. Ces derniers jouaient d’un instrument qui s’apparente à une petite mandoline et les sons qui en sortent sont vraiment caractéristiques de la musique traditionnelle du sud-est asiatique. On croirait des élastiques fixés à une boîte en carton. La danse était plutôt simple, il suffisait de faire de grands pas en levant les genoux bien haut et de frapper le sol de toutes ses forces. Quelques pas en avant, un en arrière, le groupe marque le rythme, la terre tremble, les étoiles vont se décrocher. Main dans la main, nous formions une farandole de sourires et de regards chaleureux. La population locale, clairement fière de ses traditions, paraissait vraiment heureuse de les partager avec nous. En échange de leur hospitalité, nous n’avions rien d’autre à offrir que nos plus beaux sourires ainsi que les innombrables « Akobomo !» (merci !) bien senti.



A toutes les vingt minutes, nous nous dirigions vers un nouvel arbre à encercler, vers une nouvelle demeure à honorer. Autour de l’arbre, j’ai dansé pour fêter cette nouvelle année, pour célébrer l’avenir, ses surprises, ses bonheurs, ses possibilités infinies, pour commémorer la vie passée, glorifier celle qui m’habite, accueillir celle qui sera (1). L’année du rat sera ce qu’on veut bien en faire. Alors, je vous le dis mes amis, dansons !!!

1 : L’année du rat sera marquée par des naissances. Catherine et Mélanie, chères cousines, autour de l’arbre, j’ai aussi dansé pour vous.