dimanche 30 décembre 2007

Now that I drink tea...

Londres

Avant de passer le temps des Fêtes à Montréal, j’ai fait un arrêt en Europe. Tant qu’à payer un billet d’avion, pourquoi ne pas en profiter pour visiter une capitale européenne. Malgré le vaste choix de villes fascinantes qui se présentait à moi, Londres s’est imposée par elle-même. Après l’Inde, la capitale anglaise s’avérait être un choix logique et fort intéressant. De plus, je rêvais d’y mettre les pieds depuis longtemps. À l’historien que je suis, Londres constitue une véritable Mecque. Au fan invétéré du club de foot d’Arsenal que j’incarne, la visite de Londres prend la forme d’un pèlerinage. Six jours, c’est bien peu pour explorer une cité aussi riche. Six jours, c’est bien suffisant pour dépouiller un pauvre voyageur…



Vivre à Londres coûte cher, je n’apprends rien à personne,. Je l’ai constaté dès ma sortie d’Heatrow. J’ai déboursé 25 pounds pour l’achat d’une carte magnétique donnant l’accès au métro pendant une semaine. 25 pounds = 50$ canadien = 2000 roupies = Prix d’une voiture avec chauffeur pour trois jours à Delhi !!! Me voilà donc dans le Tube, direction Camden Town, chouette quartier tout près du centre-ville. Le trajet de métro est plutôt long, plus d’une heure. Une heure avec un immense sourire accroché aux lèvres. Par la fenêtre, le métro n’est pas que souterrain, je vois les quartiers ouvriers, je vois défiler les rangées de maisons en briques brunes, je vois les terrains de foot, je vois la grisaille londonienne... J’ai cet étrange impression que je joue dans un film purement britannique et qu’Hugh Grant (ou pourquoi pas Elizabeth Hurley…) s’apprête à entrer dans le wagon et s’asseoir à mes côtés.



On dira ce qu’on veut sur les Anglaises, et sur leur pendant masculin, mais les Londoniens ont du style. Les gens sont ultra bien vêtus, rien n’est laissé au hasard, de la coupe de cheveux aux chaussures, tout est impeccable. Avec mon vieux manteau, mes pantalons tâchés et mes bottes poussiéreuses, j’ai tout simplement l’air d’un mendiant… Venant d’un voyageur qui revient de l’Inde, la remarque peut sembler déplacée mais n’oublions pas que nous sommes simplement le Crésus de l’un et le Job de l’autre. Peu importe lequel des deux rôles je jouais ce jour-là, j'étais bel et bien dans le métro de Londres et j’avais le sourire aussi large que la Manche.



Sans trop de problème, je trouve mon auberge de jeunesse. Dieu merci, ici les noms des rues sont affichés. Dormir à Londres coûte cher. 18 pounds pour partager un dortoir avec cinq inconnus = 36$ canadien = 1440 roupies = Prix d’un véritable palais en Inde, inconnu non compris ! Heureusement, à ce tarif, le déjeuner était compris. Car vous pouvez l’imaginer, manger à Londres coûte cher. On obtient difficilement un dîner pour moins de 10 pounds, un souper pour moins de 15 pounds = de 20 à 30$ canadien = 800 à 1200 roupies = un banquet digne des plus grands Maharajas.



À Londres, visiter est une des rares activités qui soit peu dispendieuse. La plupart des musées sont accessibles gratuitement. J’en ai profité pour en faire quelques uns… Imperial War Museum, Churchill Museum, British Museum, Museum of London, National History Museum, National Gallery… D’autres attractions sont payantes: Tower of London, Saint Paul’s Cathedral, London Eye, Westminster Abbey… pour un tarif moyen de 10 pounds = 20 $ = 800 Roupies = Prix d’entrée pour visiter le Taj Mahal, de loin l’attraction la plus dispendieuse en Inde.



Londres m’a réservé de belles surprises. Notamment le samedi soir 15 décembre. Marchant vers le Tate Museum, je tombe sur une très vieille et superbe église. Quelques passants entrent, d’autres sortent. Je décide d’aller y jeter un coup d’œil. À l’intérieur, le lieu est calme, paisible, tout simplement merveilleux. L’endroit me rappelle vaguement un autre… On m’apprend qu’une chorale s’apprête à offrir un concert de Noël. J’achète un billet, je prends place, je profite de cette splendide musique, il est 20h à Londres, 15h à Montréal… À des milliers de kilomètres, au même moment, Bonsecours résonne sous les traditionnelles Choralies. Je suis déjà à la maison.



Je ne peux terminer cet article sans mentionner l’accueil chaleureux de mon ami Henry, un anglais qui a étudié à Concordia il y a déjà quelques années. Étant un grand fan d’Arsenal, mon club de foot préféré, il m’a invité à regarder un match dans un pub et à faire la visite du stade. À quelques jours d’intervalles, les deux expériences sont mémorables. D’abord, victoire des Gunners sur Chelsea, leurs rivaux londoniens. L’ambiance dans le pub était survoltée. Même un match des Canadiens en séries ne provoque autant d’émotions. Ici, le foot c’est sérieux. Aucun supporter de l’autre équipe n’est admis dans l’établissement. Dans les pubs comme dans les gradins, on sépare les supporters, on évite les confrontations. Quelques jours plus tard, moi et Henry partons pour une visite guidée du stade : terrain, galerie de presse, chambre des joueurs, parking… rien de trop beau pour les gamins que nous sommes !!!

Cheers Henry !

vendredi 28 décembre 2007

Vive le traîneau magique du Père Noël !

Bangkok

Et puis ? Comment s’est passé votre Noël ? Avez-vous bien observé autour de vous ? La magie existe-t-elle toujours ? Si vous en doutez toujours, demandez à ma famille ! Je crois qu’ils viennent de passer un merveilleux Noël. Pourquoi dites-vous. Ne manquait-il pas un membre ? Il faut dire que je leur avais préparé toute une surprise !!!

Le tout a débuté au mois de novembre, en plein désert du Thar. Assis confortablement sur mon dromadaire, je cherchais un moyen de combler mon absence, un présent à offrir, un truc qui leur ferait plaisir. Le plan initial était qu’au jour du 22 décembre (journée à laquelle ma famille devait célébrer Noël), je devais les appeler à 13h précise. C’était trop simple, ça manquait un peu de piquant. J’ai donc songé à écrire un texte, à produire un diaporama, à monter un message vidéo… quelque chose de touchant qui pourrait leur faire comprendre à quel point j’aurais aimé être à leur côté pour la fête de Noël.

Est-ce le soleil qui a brûlé mon cerveau ? Est-ce les mouches me tournant autour qui m’ont fait perdre la tête ? Est-ce la déshydratation qui m’a fait perdre la raison ? Toujours est-il que l’idée du cadeau parfait est venue à moi. Concrétiser cette surprise idéale nécessitait d’abord quelques recherches sur Internet, question de vérifier la potentialité financière du projet. Le cœur étant beaucoup plus puissant que la tête, la passion a su convaincre la raison. Avant même de quitter le désert, avant même de consulter le Web, ma décision était prise : à 13h le 22 décembre ce n’est pas le téléphone qui allait résonner mais la sonnette de la porte…

Si je vous dis que le Père Noël m’a fait un lift, me croiriez-vous ? Si je vous dis que ma mère m’a serré contre elle en pleurant, me croiriez-vous ? Si je vous dis que mes deux neveux chéris ont sauté sur mes jambes en riant, me croiriez-vous ? Si je vous dis que ma sœur a crié hystériquement, me croir…. Bon celle là, j’en conviens, elle n’est vraiment pas dure à croire… Si je vous dis que cet accueil est une des plus belles preuves d’amour que j’ai jamais reçu, me croiriez-vous ? Des instants comme ceux là, ça n’a pas de prix. Et de toute manière, une fois l’idée en tête, il m’était impossible de faire marche arrière, les regrets auraient tôt ou tard pris le dessus. Et dieu sait à quel point je déteste les regrets. Je ne pouvais manquer cette opportunité d’offrir un présent unique et irremplaçable. Je pensais d’abord à mes parents, eux qui m’ont tant offert. Je voulais simplement leur donner un peu en retour. Je songeais également à mes neveux. Ensevelis sous les présents, comme tous les enfants, j’espère leur avoir enseigné que les plus beaux cadeaux ne se trouvent pas toujours sous le sapin. Pour ma part, j’ai encore une fois réalisé que le plaisir de donner est beaucoup plus puissant que de recevoir. Pour la toute première fois, je n’ai ouvert aucun cadeau. Pourtant, ce 22 décembre 2007 restera à jamais marqué dans ma mémoire comme le plus beau des Noël.


À tous ceux qui me trouvent fou, je vous dis… Merci !


jeudi 13 décembre 2007

Inde - L'Inde au pluriel

Delhi

En quittant un pays, la tentation est grande de donner ses impressions. Je veux bien me prêter à cet exercice, toutefois, je sais trop bien que trois mois sont largement insuffisants pour dresser un portrait juste. Après tout, j’en ai parcouru qu’une toute petite partie. Mon séjour m’a permis de constater une chose : l’Inde est multiple. C’est une terre de contraste. Peut-être ce n’est pas un hasard si les explorateurs de la Renaissance rêvaient d’accéder aux Indes. L’Inde est plurielle, elle est multiple. 22 langues reconnues, les cinq grandes religions représentées (auxquelles s’ajoute une multitude d’autres) ainsi qu’une panoplie de cultures et de traditions.

Le territoire est vaste, les paysages variés. J’ai vu des montagnes enneigées, des jungles luxuriantes et des contrées désertiques. Par le fait même, j’ai traversé des climats opposés. À Badrinath, même revêtu de tout mon linge le plus chaud (coton ouaté, manteau d’hiver, combine sous mes pantalons, tuque, botte d’hiver), j’ai gelé intensément. À l’inverse, le soleil brûlant dans le désert du Thar m’a laissé un joli teint. Compte tenu que la saison des moussons était bel et bien terminée, je n’ai pas rencontré beaucoup de pluie.

J’ai visité des mégalopoles surpeuplées et des villages reculés. J’ai vu des vaches à Delhi et des coupoles de télévision satellite en plein désert. Le rural et l’urbain se mêlent parfois bien étrangement. Il y a certains éléments qui ne se mélangent pas aussi facilement, les classes sociales par exemple. On sent toujours le poids immense du système de castes. Bien qu’en théorie, le système n’apparaît plus dans le code de lois depuis belle lurette, il en va bien autrement dans la tête des Indiens. L’ascension sociale ici semble être une rare exception.

L’argent aussi ne circule pas. Les riches en ont plus qu'ils ne pourraient en dépenser, les pauvres n’en n’ont tout simplement pas. Le fossé est gigantesque. Il est vrai qu’une classe moyenne prend forme, mais il n’en demeure pas moins que la vaste majorité vit dans une extrême pauvreté. En Inde, je me sens comme Donald Trump, sans la mise en plis. Mon budget de voyage étant étalé sur plusieurs mois, j’ai évité les hôtels, restaurants, et moyens de transport luxueux. Mais croyez-moi, en temps normal, nous tous avons les moyens de vivre en véritables maharajas. Cependant, le plaisir du voyage réside justement à travers les ballades en rickshaws, les trains de la 2e classe et les autobus publics. Il serait bien dommage de rater ce rendez-vous avec la population locale uniquement pour une raison de confort.

Car après tout, ce que je retiens le plus de mon séjour, ce n’est ni les paysages, ni les monuments, mais bien les Indiens. Plus particulièrement, leurs étranges comportements, leurs manières bizarres, leurs mentalités différentes. Je les ai observés. Je les ai vus agir. Je connais un peu mieux leur façon de vivre. Toutefois, je ne peux pas affirmer que je saisis leur univers. Il est tellement plus facile de juger que de comprendre. Je l’ai souvent dit et je le répète à nouveau : l’Inde est un autre monde, un monde surréaliste et insoupçonné. Un monde où l’ordre prend des allures de chaos. Un monde qui m’a fait réfléchir plus qu’il m’a touché. Un monde où la philosophie l’a emporté sur la spiritualité. Un monde que jamais je ne comprendrai et surtout, que jamais je n’oublierai.

lundi 10 décembre 2007

Inde - Photos - Kajuraho

Ceci est un avertissement, certaines photos pourraient choquer une partie de mon auditoire. Vous voila avertis !!!

samedi 8 décembre 2007

Inde - Photos - Souvenirs d'enfance - Varanasi

Varanasi

Voici quelques photos de Souvenirs d'enfance que j'avais oublie de rajouter. Si vous etes attentifs, vous verrez que y'a un petit malin qui m'a joue un tour...

vendredi 7 décembre 2007

Inde - Les larmes du Gange

Varanasi

Assis sur les abords du Gange, je vois la boue, les déchets, les eaux souillées. Sur certains ghats à Varanasi, tous les jours de l’année, à toutes les heures de la journée, on y brûle des corps. Pour un hindou, y être incinéré représente bien plus qu’un honneur, c’est une bénédiction.



Assis sur les abords du Gange, je vois les cadavres recouverts d’un linceul fleuri, les bûchers enflammés, les nuages de cendres. Tout près, je vois des hommes, que des hommes. Certains sont de la famille des défunts, les autres, encore moins chanceux, sont attitrés à cette tâche ingrate qu’est la crémation des corps. Ils font partie de ces fameux Intouchables. Il est parfois difficile de distinguer les deux groupes, l’absence d’émotion caractérise aussi bien les uns que les autres. Les hommes parlent, rient, discutent au téléphone cellulaire, pissent, se décrottent le nez, se grattent la poche, un peu plus loin, ils jouent au cricket. C’est l’Inde quoi !

Assis sur les abords du Gange, je vois la vie, mais je ne comprends pas. Je vois les cadavres qui brûlent, la chair qui fond, les bras qui se raidissent, les doigts qui se crispent, les jambes qui s’élèvent, les visages qui partent en fumée, les corps qui deviennent cendres.



Assis sur les abords du Gange, je vois la mort, mais je ne comprends pas. Je vois les chèvres brouter les parements fleuris des cadavres, les chiens qui attendent patiemment, les touristes qui s’approchent un peu trop.

Assis sur les abords du Gange, je vois mais je ne comprends pas. Et puis, un bruit, un sanglot se fait entendre. Un homme s’approche en pleurant. Accompagné, il descend au fleuve, gémissant de plus en plus fort. Désespéré, il s’effondre dans la boue, aux pieds d’un des cadavres, celui de sa jeune épouse partie trop vite. Le visage entre les mains, il pleure bruyamment. Il retire ses chaussures, descend dans le Gange, se penche pour prendre de l’eau dans le creux de ses paumes, s’asperge le visage, il pleure abondamment. Il regarde au loin, sur l’autre rive, se demandant surement pourquoi. Il reprend de l’eau et dans un geste sacré, il en dépose sur le visage de sa bien-aimée. Il s’éloigne en sanglotant, sa douleur est immense, incapable de le supporter, ses jambes flanchent, il s’écroule à nouveau sur le sol boueux. La main sur ses épaules, ses amis tentent de le réconforter. Rien à faire, cet homme pleure. Parmi ces centaines d’Indiens inflexibles, il m’apparait comme une bouffée d’air frais. Lui, je le comprends. Il pleure, il se sent surement bien seul. Pourtant, je pleure avec lui.



Assis sur les abords du Gange, je pleure. Cet homme me touche droit au cœur et me réconcilie, l’espace d’un instant avec l’Inde. Ce pays que je traverse depuis trois mois et que je ne saisis toujours pas. Dans cet endroit d’horreur, la douleur et l’humanité de cet Indien sont d’une beauté déconcertante.

Assis sur les abords du Gange, je pleure, couvert de cendre, vivant et heureux.

dimanche 2 décembre 2007

samedi 1 décembre 2007

Inde - Partager un repas, quel bonheur !

Dans un train entre Ahmedabad et Jaipur

J’aime l’Inde ! Rarement depuis mon arrivée me suis-je senti aussi près de ce pays. Je suis inconfortablement assis dans mon wagon de train. Destination : Jaipur. Tout autour, fils et filles de Brahma discutent, lisent le journal, jouent à des jeux sur leur cellulaire, ils vivent. Pendant que j’écris ces mots, un couple âgé d’une soixantaine d’années se prépare pour souper. Après avoir déposé un thali et quelques chapatis sur une petite assiette en carton, elle pèle un oignon. Les deux assis en indien, sur la même banquette, ils partagent en silence le repas. Du bout des doigts de leur main droite, règle d’hygiène oblige, ils font de petites boulettes qu’ils portent à leur bouche. La femme sort une bouteille d’eau minérale contentant un liquide blanc, probablement du lait. Elle en verse dans deux verres cartonnés. N’ayant rien prévu pour le voyage, l’odeur du repas réveille mon estomac. Celui-ci s’agite. On arrive à une gare. Sur le quai, une multitude de vendeurs ambulants clament haut et fort la nature de leur commerce. À travers les barreaux d’une fenêtre, un homme du wagon obtient un repas en échange de quelques roupies. Bien enveloppé dans un sac de plastique blanc, on devine une boîte de carton. Il ne manque sur celle-ci que la tête du poulet pour se croire à la maison. L’homme rejoint sa femme sur la couchette du haut. Assis en indien, ils partagent à leur tour le repas, tout aussi silencieusement que le couple plus vieux. Le wagon est bientôt rempli d’un arôme épicé, c’est clairement l’heure de la pitance. Par l’entremise de mes narines, mon estomac envoie un message clair à mon cerveau : « J’ai faim ! ».

Cette nuit, je dormirai sur la couchette du milieu ce qui signifie que je dois attendre que mes compagnons de banquette aient sommeil. J’attends, le calepin sur les genoux, heureux. À quelle heure nous coucherons-nous ? Ça m’ait bien égal. Il y a des moments en voyage où il ne se passe rien, où le temps semble s’arrêter, où le bonheur sort de sa cachette. Je crois que des moments pareils se vivent également à la maison. Ils sont peut-être juste plus rares. L’habitude et la vitesse de notre quotidien les camouflent.

Un homme passe dans l’allée en criant : « Diner, diner ! » Finalement, je me décide. Aidé de mon voisin de banquette devenu interprète, je commande un peu de nourriture. Il en prend un également. À notre tour de partager le repas sur notre banquette. Mon nouvel ami semble excité à cette idée, il ne mange probablement pas souvent avec un étranger. Je m’efforce de manger de la main droite. Tout comme les couples qui l’ont fait précédemment, on mange sans trop parler. Il me demande à peine si la nourriture n’est pas trop épicée. La réponse se trouve déjà dans mon assiette presque vide. Aussitôt le repas terminé, à la manière indienne, il balance nos couverts cartonnés par la fenêtre. Partager un repas est un geste universel d’une grande puissance. L’inconnu devient un ami. Les bonnes bouffes entre bons copains me manquent certainement. Quoi de mieux qu’un bon souper avec ses vieux chums. Se remémorer le passé, profiter du moment présent et bâtir une amitié intemporelle.

D’autres images me viennent en tête. Celles des soupers en famille, les rendez-vous quotidiens de mon enfance. Un moment d’échange, de communion, de partage, parfois de débats. Tous ces repas constituent pour moi un véritable trésor dont je me ferai le devoir de transmettre à mes enfants. Serge assis à mes côtés, à ma gauche. Anne-Marie à ma droite, au bout de la table. Frédéric à l’autre bout. Nicole en diagonale devant moi. Je revois la scène, j’entends presque les discussions, les fous-rire. L’assiette de mon frère est déjà vide. Victime de mes caprices, la mienne est toujours pleine. Peut-être que je parle trop ! Peut-être ai-je hérité de l’appétit de mon voisin de gauche… Pauvre Nicole, cuisiner pour les Caron n’était pas une simple tâche. J’entends les conversations : vie quotidienne, actualités, politique, religion, voyage, éducation et évidemment : la garderie. Sujet incontournable qu’il fallait contenir par des restrictions. Les trois enfants, las d’en entendre parler, juraient de ne jamais y travailler…

Heureusement, la vie nous réserve bien des surprises. Les années passées, la table familiale s’est tranquillement vidée de ses convives. Les rendez-vous quotidiens ont laissé la place à des rencontres occasionnelles. Les opportunités ne manquent pas pour se réunir à nouveau. Avec le temps, la table s’est allongée afin d’accueillir cette famille grandissante. Comme le dit la célèbre maxime : « C’est avec de l’amour que l’on fait de l’amour. ». C’est toujours avec grande joie que je renoue avec ces rendez-vous me mon enfance, pur sentiment de bonheur. Dans quelques jours, la tablée se réunit pour célébrer Noël, fête familiale par excellence à mes yeux. Car après tout, malgré la prolifération des Pères Noël de centres d’achats, la fête demeure magique. Sous l’arbre de Noël, les innombrables cadeaux ont remplacé la crèche. Le petit Jésus en est probablement fort désappointé. Néanmoins, il peut être fier de la quantité d’amour engendrée à l’occasion de son anniversaire. Un amour si puissant qu’il traversera continents et océans. Il le faudra bien car cette année, la table aura un couvert en moins. Si seulement le véritable Père Noël, pas celui des Promenades St-Bruno, s’il pouvait me faire un lift ! Pour la toute première fois, le prénom d’un membre de la famille ne se retrouvera pas sous le sapin.
À tous ceux qui ne croient plus en la magie de Noël, je vous mets au défi. Entre deux cantiques, entre deux plats dans le four, entre deux bouchées de dinde, entre deux cadeaux déballés, prenez le temps d’écouter, de sentir, de goûter. Prenez la peine de regarder autour de vous, les poignées de main, les becs, les accolades, les étreintes… Prenez, mais donnez à votre tour ! Un sourire, un compliment, une oreille attentive. Je doute fort qu’après tout ça, vous n’y croirez toujours pas. À tous ceux qui fêteront Noël en famille. À tous ceux qui partageront repas, présents et amour auprès de leurs parents et amis. Faites le même exercice. Savourez ces moments magiques. Profitez de ces instants précieux.

À vous tous chers lecteurs. À vous tous chers amis, à vous et à votre famille, je vous souhaite un merveilleux temps des Fêtes. Je vous dis : « Joyeux Noël ! »

mercredi 28 novembre 2007

Inde - Cette nuit à Diu...

Diu

Il est 11h51 à Montréal. Mon laptop me le confirme. Ici, je ne sais même pas quelle heure il est. Je viens tout juste de quitter le café internet duquel nous avons discuté. Je suis revenu à mon hôtel, fatigué mais o combien heureux de t’avoir parlé à nouveau. Je suis monté à ma chambre et j’ai décidé que la nuit était trop belle pour ne pas en profiter un peu. J’ai pris mon ordinateur, je suis sorti sur le balcon, j’ai ouvert mon petit paquet de biscuits, la nuit s’annonce magnifique. La ville côtière de Diu est d’un calme non-indien. La lune, presque entière, éclaire la toiture des maisons et la façade de l’église Saint-Thomas, vestige de la présence portugaise sur l’ile. En prêtant l’oreille, on peut facilement suivre les hordes de chiens errants qui rôdent et qui terrorisent les chats du quartier. On peut sentir la mer. L’air est empreint de ce parfum d’eau salée si caractéristique des bords de mers. J’affectionne particulièrement cet arôme. Je me plais à contempler le phare et ses inlassables appels lumineux. J’adore le silence imparfait de cette ville qui s’endort doucement sous le bruit des quelques bateaux à moteur encore au large. La nuit est charmante. Comme toi, elle est bien trop belle pour la laisser seule. Je décide donc de l’accompagner. Pour me remercier, elle me fait cadeau de ta présence. De par la lune, je vois tes yeux étincelants esquisser un sourire à mon endroit. De par le bruit des vagues, j’entends ta voix caresser mes oreilles. De par l’exquise brise, je peux humer le doux parfum de ta peau. Je peux presque sentir tes doigts s’attarder tendrement le long de mon bras. Cette nuit, nous sommes tous les deux à Diu.

lundi 26 novembre 2007

dimanche 25 novembre 2007

samedi 24 novembre 2007

Inde - Photos - Jodhpur

Jodhpur

La ville bleue avec son impressionnante forteresse.

mercredi 21 novembre 2007

mardi 20 novembre 2007

Inde - La naissance du quatrième monstre

Jaisalmer

Roupies, school pen, chocolat. Il est difficile d’entrer en contact avec les enfants défavorisés de l’Inde sans qu’un seul de ces trois mots surgisse. On s’approche, on leur sourit, on leur demande leur nom… rien à faire, la communication semble se limiter à ces trois articles. On peut facilement imaginer la curiosité des enfants envers les étrangers il y a trente, vingt ou dix ans.

Que s’est-il passé ? L’historien diplômé que je suis va tout vous expliquer.
Il y a fort longtemps, les quelques voyageurs parcourant le pays bénéficiaient de formidables relations avec les enfants croisés sur leur route. Les conversations mimées, les sourires gratuits, les fous rires inexpliqués, les rapports authentiques, les rencontres devaient être tout simplement magiques. Il y a disons… 30 ans (1), un de ces touristes (2), remplie de bonnes intentions, posa un geste tout simple mais o combien lourd en conséquences. À la suite d’une belle rencontre, elle laissa à un enfant une pièce d’une roupie.

Le jour, la semaine, le mois suivant, un second touriste débarqua au village du jeune garçon. Encore une fois, fabuleuse expérience : sourires, rires, jeux et puis l’étranger s’éloigne. À la toute dernière seconde, le gamin se rappela de la pièce si gentiment offerte lors de la rencontre précédente. C’est alors qu’il prononça bien innocemment le mot « roupies ». Le premier monstre était bien involontairement né. Obtenant encore une fois une pièce, il répéta le geste, l’expliqua à ses copains, si bien que rapidement tous les enfants de l’Inde connaissaient la recette. C’est alors que les relations changèrent, l’authenticité, la curiosité, tout cela revêtit de moins en moins d’importance. Au cours d’une conversation, le mot « roupies » tardait de moins en moins. Il vint même à devancer le « Namaste » d’usage. Parfois, il le remplaça totalement. L’étranger avait beau sourire, poser des questions, marcher sur les mains, l’enfant répétait inlassablement le mot. « Ce riche étranger a l’air gentil, il me donnera bien une roupie ou deux ! » se dit-il.

Il y a environ 20 ans, un autre étranger (3) attentionné arriva en Inde. Elle en était à son second voyage dans ce fabuleux pays et elle était nostalgique du temps où le mot « roupies » ne venait pas tout détruire. Pour établir à nouveau un lien particulier avec les enfants et concernée par le taux d’analphabétisme, elle décida d’apporter des crayons (4). La découverte se propagea aussi vite chez les étrangers à la recherche d’un contact authentique que chez les enfants. Si bien qu’au mot « roupies » s’ajouta celui de « school pen », le second monstre avait été engendré. Rapidement, ni les pièces ni les crayons ne suffirent plus. Le fossé devint de plus en plus large entre ces enfants et les voyageurs.

Il y a plus ou moins 10 ans, l’Inde reçu la visite d’un autre étranger inventif (5). Voulant franchir ce fossé, il apporta avec lui une denrée drôlement plus efficace que des crayons : du chocolat. Le résultat était probant. Les mots « roupies » et « school pen » étaient toujours présents mais les barrières tombèrent à grands coups de Kitkat et de barre Mars. Toutefois, les effets furent bien temporaires et le manège se répéta : le troisième monstre, sucré mais tout aussi terrible, avait vu le jour. Ainsi, tous les enfants indiens adoraient la sainte trinité : roupies, school pen, chocolat.

D’après de très récents rapports, à l’instant même que j’écris, un étranger (6) inventif et lui aussi fort bien intentionné, se promène en Inde en offrant des Polaroids aux enfants. À son tour, il participe à cette image de l’étranger pourvoyeur qui tue toutes possibilités d’échanges. Bien que sa nouvelle technique fonctionne rondement, il est en train d’enfanter le quatrième monstre. La prophétie veut heureusement que dans 10 ans, un nouvel étranger viendra en Inde à la rencontre des enfants. Il n’apportera avec lui, ni roupies, ni crayons, ni chocolat, ni polaroid. Dieu seul sait ce qu’il apportera (7), mais espérons simplement que cette fois, les barrières tomberont avec autres choses que de menus objets de pacotilles (8).


1 : Après tout, l’Histoire n’est pas une science exacte.
2 : Les historiens croient qu’il s’agissait d’une touriste espagnole résidant à Barcelone.
3 : D’après de récentes études archéologiques, il s’agirait d’une américaine de l’Orégon.
4 : Pas n’importe quels crayons, des crayons pour l’école.
5 : La dendrochronologie nous laisse croire que ce touriste était de nationalité française, plus précisément de la région de Chamonix.
6 : La datation au carbone 14 nous révélera un jour qu’il s’est déjà nourri chez un certain Mr Patates et chez Ali-Baba.
7 : Si seulement le canadien le savait !
8 : Et si le plus beau présent, c’était simplement le don d’un peu de son temps. Et si le secret était de jouer avec eux au cricket…






jeudi 15 novembre 2007

Inde - Enigmus Canadiensis

Jaisalmer


Les déplacements sont souvent sources d’attente. Voilà pourquoi moi et mes compagnons de voyage jouons régulièrement au jeu des énigmes. Certaines sont plus faciles que d’autres, la plupart sont loufoques. Toutefois, elles ont toutes un point en commun, elles activent nos neurones aux moments opportuns. Chers lecteurs, il est temps de jouer avec vous. Je vais vous poser une énigme. Celle-là même qui a occupé mon esprit pendant plusieurs heures. Prêts ? Allons-y !

Un canadien se ballade à travers un pays pauvre (prenons aléatoirement l’Inde…). Il rencontre des mendiants de tout acabit : des vieillards aveugles, des femmes aux membres rongés par l’infection, des enfants affamés, des mères aux bébés inanimés, etc. Depuis des semaines, il côtoie la misère humaine. Soudain, il croise une gamine s’amusant à lancer un pauvre chiot. Celui-ci, blessé, boite péniblement vers un lieu plus sûr. Cette scène arrache le cœur de ce canadien. Il sent une douleur, une tristesse qui dépasse le malaise éprouvé devant les mendiants. Comment expliquer cette réaction disproportionnée ? Ce canadien est-il un monstre ?

Voici donc l’énigme qui m’a fait énormément réfléchir ces derniers temps. Je vous la soumets, je vous demande d’y penser à votre tour. Peut-être pouvez-vous m’aider à trouver une réponse. À plusieurs, nous ne parviendrons peut-être pas à la solution mais nous pouvons nous y en approcher. Dans quelques jours, je vous offrirai le fruit de ma propre réflexion. D’ici là, j’espère lire ici-bas vos hypothèses. J’espère plus simplement vous faire méditer. En terminant, je vous donne un seul indice supplémentaire : je pense bien connaître ce canadien et il n’a rien d’une bête insensible…

Un chien en Inde ressemble en tout point à son lointain cousin canadien. Il aboie, il donne la patte, il court après les chats, il zigne… Il pourrait être le vôtre, il pourrait être le mien. Il en va bien autrement des êtres humains qui peuplent ce pays fabuleux. La majorité semble provenir d’un autre univers, un monde auquel je n’appartiens pas, que je ne saisis pas tout à fait. Il y a donc un fossé entre cette personne et moi. D’autres vêtements, d’autres mots, d’autres gestes. Se crée alors un détachement face à cet être avec lequel j’ai peine à m’identifier. Dans ce décor complexe et impénétrable qu’est l’Inde, ces gens s’ajoutent aux nombreux éléments incompréhensibles pour l’étranger que je suis. Je ne parle pas ici de tous les Indiens. En effet, il en va bien autrement des petits hôteliers, des restaurateurs, des marchands et des guides touristiques qui côtoient constamment les Occidentaux et avec qui on partage une même langue, les mêmes habits et souvent le même humour. La réflexion faite ici haut concerne principalement les mendiants. Ces derniers ne parlent pas anglais mais n’ont-ils pas les mêmes espoirs, les mêmes peurs ? Pourquoi alors un tel détachement ? Après tout, eux aussi mangent, aiment, rient, pleurent, rêvent et… mendient.

Le chien ne mendie pas. Il ne tend pas la patte pour quelques roupies. Il ne cherche pas à mettre à profit sa condition miséreuse. En Inde, la mendicité m’apparait comme un sordide spectacle. On a cette impression d’être au théâtre : le décor, les comédiens, les costumes, on pourrait presque voir le maquillage… Les mises en scène les plus tragiques sont certainement les plus payantes. On assiste quotidiennement à un prodigieux freak show. Résultat, on ne voit plus le drame qui véritablement s’y joue. Car même si le rideau tombe en fin de soirée, il n’en reste pas moins que les comédiens vivent dans la rue, affamés, dénudés, brisés. Leur propre misère, voilà tout ce qui leur reste à mettre à profit. Peut-on vraiment leur en vouloir ? Je ne connais pas la conclusion de ce triste spectacle. Je ne peux me résoudre d’encourager cette sombre industrie théâtrale. Je décide de ne pas y prendre part, les roupies resteront dans ma poche jusqu’au prochain serveur, garçon de chambre ou conducteur de pousse-pousse.

lundi 12 novembre 2007

Inde - Le compte des cinq et une nuit

Désert du Thar

Une semaine dans le désert sur le dos d'un dromadaire

Jour 1
Tu découvres avec émerveillement les beautés du désert.
Craintif, tu t’agrippes solidement à ta monture et ce, sans répit.
Tu te réveilles au beau milieu de la nuit en compagnie de toutes les étoiles de la galaxie.
Tu te retiens toute la nuit car tu crains d’aller pisser sur un scorpion.



Jour 2
Tu te lèves le matin en pensant que finalement, les dunes de sable sont moins confortables pour ton dos que tu ne l’aurais imaginé.
Tu ne réagis plus aux monstrueuses flatulences des dromadaires qui te précèdent.
Tu manges sans préalablement te secouer les mains.
Tu peux sentir l’odeur de ta monture même si tu trouves à une centaine de mètres.
Pour plus confort, tu essaies vainement de meubler le sable sous ton lit avant d’aller dormir.
Tu t’endors sans trop t’inquiéter des petits grattements qui proviennent de ton sac à dos.




Jour 3

Tu te réveilles le matin avec l’impression d’avoir porté ton dromadaire sur ton dos toute la nuit.
Tu conduis toi-même ton dromadaire.
Tu réalises que tu es imprégné de la répugnante odeur de ton dromadaire.
La démarcation de ta montre sur ton poignet gauche ne parait presque plus.
Tu écoutes les interminables histoires de ton camelman sans vraiment comprendre.



Jour 4
Le matin, tu ne te préoccupes plus des empreintes autour de ton lit.
Tu commences à dégager une forte odeur car quelques unes des mouches de ton dromadaire préfèrent maintenant te tourner autour.
Même après deux heures de randonnée, tu es toujours confortablement assis sur le dos de ton dromadaire.
Aux toilettes, tu as trouvé la position idéale pour ne pas trop salir tes pantalons.
Tu es si loin de toute « civilisation » que le projet Souvenirs d’enfance prend tout son sens.
Tu comprends pourquoi la Grande Ourse ne s’appelle pas simplement Grand Chaudron.



Jour 5
Tu contemples la beauté du levé du soleil sans penser sortir ton appareil photo.
Les mouches qui t’ont adopté ne te dérangent plus.
Ton dromadaire comprend le français.
Tu jures ne plus jamais poser de questions à ton camelman au sujet de la mythologie hindoue.
Tu rationalises le papier de toilettes pour t’assurer de jamais n’en manquer.
Tu vas aux toilettes en pleine nuit sans penser aux serpents et aux scorpions qui font de même.



Jour 6
Tu commences à comprendre l’anglais de ton camelman.
Tu as converti ton dromadaire au christianisme.
Tu manges les dals préparés par ton camelman sans que tes lèvres brûlent.
Ayant totalement perdu le sens de la raison, tu décides de prolonger ton séjour d’une journée.
Tu associes une étoile à tous ceux que tu aimes et qui te manquent.



Jour 7
Ton dromadaire t’obéis finalement.
Tes fesses commencent à avoir un merveilleux teint.
Tu commences à avoir hâte de rentrer.
L’exposition de ton cerveau à toute cette chaleur te donne des idées complètement folles.

jeudi 1 novembre 2007

Inde - Photos - Bikaner

Bikaner

Quelques photos de Bikaner, premier contact avec le Rajasthan. Notez le temple des rats, la soi-disant huitième merveille du monde !!!

lundi 29 octobre 2007

Inde - Les dieux de l'hémoglobine

Amritsar

Deux millions d’habitants, le 3/4 se déplacent à vélo, la moitié en pousse-pousse, et le 1/3 en rickshaws… La circulation ici est intense. Heureusement, les vaches sont absentes du portrait. En effet, la ville est en grande majorité de confession sikh. C’est d’ailleurs se qui explique ma présence ici. Amritsar est la ville la plus importante pour les sikhs. Au XVe siècle, un homme nommé le gourou Nanak y a posé les bases de cette religion. Rejetant le système de castes hindou et prônant l’égalité de tous, ses idées étaient fort avant-gardistes pour son époque. C’est donc avec beaucoup de curiosité et d’empathie que j’ai décidé de quitter les routes touristiques pour prendre la direction du Golden Temple (le Saint-Pierre de Rome de la religion sikh). Ce temple est bien plus que magnifiquement doré, il est un lieu d’accueil et de partage.



D’abord, on peut loger gratuitement (et modestement) dans une des bâtisses adjacentes et l’on peut aller se restaurer à la cuisine communautaire. Au menu : dal, riz en crème, chapati et ce, à volonté. Il suffit de se joindre aux centaines de sikhs assis par terre et de ne pas trop craindre la proximité de votre assiette avec les pieds de votre voisin. Le repas est tout aussi gratuit. Il est difficile d’imaginer endroit pareil chez nous. Des milliers de repas servis chaque jour par une véritable armée de bénévoles. Toutes les tâches sont réparties : le type qui distribue les fourchettes, celui qui les nettoie et celui qui va les porter au premier une fois propres. La cuisine est impressionnante. On y retrouve des hommes et des femmes roulant à un rythme infernal la pâte pour faire des chapatis ainsi que des cuisiniers brassant une quantité monstrueuse de dal dans d’immenses chaudrons.



Encore plus ahurissant, l’endroit où l’on fait la vaisselle. Dans un vacarme incessant, une centaine de personnes debout autour de longues cuves nettoyant assiettes, bols et ustensiles. Dans tous ces petits gestes, on retrouve la puissance de l’engagement communautaire. On sent bien que les bénévoles ici sont d’abord des pèlerins qui se font un devoir et une fierté de donner de leur temps pour la communauté. On ne peut pas rester indifférent devant pareille démonstration de partage. Ici, même les senteux sont les bienvenus, il suffit de respecter certaines règles qui régissent le temple : pieds nus et tête couverte par un turban ou un foulard (Avec ma barbe de deux semaines et mon foulard, je me fonds presque dans la foule!). C’est donc dans l’espoir d’en connaître davantage sur cette religion aux valeurs familiales et collectives que j’ai pris la direction du musée.



L’histoire du sikhisme y est retracée de manière troublante. Les sikhs sont des martyrs depuis le tout début. Les tableaux se succèdent, plus macabres les uns que les autres. Les horribles supplices s’enchaînent : chaudrons, scies, bébés… mon malaise s’accroit. Les sikhs sont plus que des martyrs, ils se présentent en victimes. Un souffre-douleur qui semble étaler fièrement ses malheurs. Les peintures ne semblent pas implorer : « Voyez, faites que cela n’arrive plus jamais! », ils rugissent aux oreilles des pèlerins : « Voyez, soyez prêts à vous défendre ». Car tout près des joyeux tableaux sont présentés des épées, des dagues, des obus, des missiles… Où va-t-on avec tout ça ? Que penser d’une religion qui malgré son sombre passé, est fascinée par les armes. Le kirpan n’est pas une arme vous diront-ils. Il reflète néanmoins le souvenir des martyrs et l’idée qu’en leur nom, le sikh se battra. Où va une religion dont la base est faite de violence, de pleurs et de sang ? C’est peut-être moi qui saisis mal le message.



Peu importe si je suis croyant ou non, je réalise ici que je suis chrétien. Que je le veuille ou non, je connais son système de valeurs, j’y adhère en grande partie, il a un certain sens à mes yeux. Ce que l’on ne connait pas nous parait souvent insensé. Après tout, qu’est-ce qu’un sikh peut bien comprendre du christianisme lorsqu’il est exposé aux épisodes sanguinolents de sa longue histoire : les premiers chrétiens livrés aux lions des arènes romaines, les Croisades, l’Inquisition, la Saint-Barthelemy, le Bloody Sunday… Je me demande bien ce qu’il peut penser d’une religion dont la base est faite de violence, de pleurs et de sang ? On peut bien lui expliquer les concepts de paix et d’amour de son prochain mais que retiendra t-il s’il voit le Christ ensanglanté sur la Croix.

samedi 27 octobre 2007

Inde - Merde, une infection !!!

Dharamsala

Si l’on remplace les yogis par les moines tibétains, Dharamsala ressemble beaucoup à Rishikesh. La ville est pleine d’étrangers, les facilités sont nombreuses, on y retrouve quelques bons restaurants et une tonne d’hôtels bon marché. Il y fait bon s’y arrêter un peu. Mais, contrairement à Rishikesh, je ne fais que passer. Il m’est tout de même arrivé bien des aventures ici sur la terre d’exil du Dalaï-lama.



Pour ceux qui l’ignorent encore, mon voyage revêt un caractère scientifique de haute importance. Les prochains mois passés en Asie me permettront d’analyser la faune et la flore afin d’y déceler des indices prouvant l’existence d’un animal fabuleux : le dragon. J’espère découvrir si l’animal existe vraiment. Dans cette quête, je suis aidé de mon neveu Vincent qui adore les dragons et qui possède plusieurs livres sur le sujet. Tout au long de mon voyage, il pourra me fournir de précieux renseignements. Dans ma mission, je suis accompagné de Gladys, un petit dragon qui me suivra partout. Vincent conserve à la maison son compagnon Elliott.




En Inde, il semblerait que les dragons se font discrets. Il existe très peu de représentations de dragon dans la culture indienne. Dans le nord seulement, près des montagnes, à travers la religion bouddhiste, j’ai pu voir quelques représentations. Dans la Vallée des Fleurs par exemple, j’ai vu des indices qui ne trompent pas : des cacas si énormes qu’ils ne peuvent provenir que d’un gigantesque animal. Toutefois, l’analyse des photos est insuffisante pour identifier clairement le propriétaire de ces gros cadeaux. Vincent m’a décrit la méthode permettant d’évaluer la fraîcheur du dit tas… Je me suis donc procuré un thermomètre dans l’espoir d’en revoir à nouveau et ainsi pousser un peu plus loin l’investigation. Il me faut toutefois être vigilant, les fientes de dragons sont extrêmement toxiques.



C’est donc avec beaucoup de prudence que j’ai approché un petit amoncellement nauséabond trouvé au bord d’un lac, près de Dharamsala. Il n’était pas aussi gros que les autres découverts précédemment mais il dégageait une très forte odeur. Je n’avais pas mon thermomètre avec moi alors j’ai donc apporté un petit échantillon dans ma chambre d’hôtel afin de procéder à l’analyse. J’étais tellement énervé qu’un mouvement maladroit a fait tomber une goutte de caca sur mon sourcil, en plein sur mon piercing! Cela n’a pas été long pour constater que la merde de dragon est très toxique. En quelques instants, une infection se déclarait transformant mon arcade sourcilière en usine à pus. Pour éviter les complications, j’ai du me résigner à retirer mon piercing. Je ne savais pas à quel point ce petit bijou fait maintenant partie de moi.



Une visite à la clinique tibétaine et quelques antibiotiques plus tard, mon air de gars ayant mangé une sérieuse volée se dissipait. Le tout revenait tranquillement à la normale, excepté mon piercing, toujours absent de mon regard, et pour un petit bout encore… Il me faudra être patient avant de le remettre et ce, même si je me sens un peu tout nu. Pour revenir à nos dragons, j’ai tout de même noté la température de la crotte (59 degré Celsius) sans toutefois connaître ce que cela signifie. Je vais demander à Vincent de vérifier de son côté si il peut m’aider. Je vous tiendrai au courant des mes découvertes mais d’ici là, vous pouvez visiter notre blog sur le sujet : lesdragonsdelasie.top-depart.com .

mardi 23 octobre 2007

Dragons - Les dragons des temples

Salut Vincent !
Merci beaucoup pour les informations. Je suis certain que ça va m’être utile tôt ou tard. Je reviens tout juste de trois jours passés dans un monastère. C’est un endroit où vivent des moines bouddhistes. Je crois qu’ils aiment particulièrement les dragons car j’en ai vu beaucoup de sculptés ou de dessinés sur leurs temples. Pas étonnant car là-bas, on est vraiment très près de la Chine. Depuis que tu m’as donné les explications sur les cacas, je n’en ai pas revu mais je reste attentif. Je me suis acheté un thermomètre pour vérifier la température. Je vais essayer de me trouver des gants pour bien me protéger. Les prochains jours sont les derniers que je vais passer dans les montagnes de l’Inde alors j’espère bien trouver quelque chose. Je t’embrasse très fort.

Je t’aime
Olivier xx

lundi 22 octobre 2007

Inde - Pour le meilleur et le pire

Shimla

J’ai bien peu de choses à dire au sujet de cette ville qui m’apparait être le Saint-Sauveur indien. Les rues sont propres, pas de rickshaws, pas de voitures, pas de vaches, pas de mendiants, pas de pauvreté. Une église, des beaux restaurants, des grands magasins (Adidas, Baskin Robbins, Benetton, Sony…) et leurs clients habillés à l’occidental. Les jeunes mariés portant le jeans, symbole de leur appartenance à une classe moyenne indienne. Cet endroit ne ressemble en rien à l’Inde que j’ai vue, celle que j’ai lentement apprivoisée, celle qui m’a si facilement envoûté. L’Inde ici est beaucoup moins mystique, moins bouleversante, moins choquante, moins étrange, moins déroutante. Elle est plus riche, peut-on lui en vouloir ? L’Inde change, elle se modernise. Tel un mariage forcé entre elle et l’Occident, elle évolue pour le meilleur et pour le pire. Selon la tradition indienne, la mariée quitte sa famille pour joindre celle de son époux. Au terme de cette union, l’Inde perdra assurément une partie de ses charmes et de son âme. Espérons seulement que les enfants se souviendront…


samedi 20 octobre 2007

Inde - Le bonheur d'un senteux

Shimla

Si Dieu existe, les probabilités qu’il se soit retiré en Inde sont extrêmement fortes. L’endroit rêvé pour une retraite parfaite, un milliard cent millions de dévots. Louangé de toutes les manières inimaginables : hindouisme, islamisme, bouddhisme, sikhisme, jaïnisme, christianisme, judaïsme. Glorifié avec une ferveur qu’il est difficile de soupçonner à Montréal. Ici, la question « Crois-tu en Dieu ? » n’est même pas concevable. Après le typique « Where are you from ? » et le « What’s your name? », on nous demande régulièrement de quelle religion nous sommes. Ceux avec qui j’ai eu l’honnêteté de répondre que je ne pratique aucune religion ont réagi avec autant d’incompréhension que si je venais de leur dire que j’étais Kalki, la dixième et dernière réincarnation de Vishnu.

Jusqu’à présent, les lieux traversés étaient fortement teintés par la religion hindoue. En arrivant au monastère de Menri, on entre dans un tout autre univers : le bouddhisme. Mais attention ! Pas n’importe quelle forme. Il existe cinq formes de bouddhisme et la plus ancienne est celle nommée Bon, c’est celle pratiquée à Menri. Ici il existe un autre chef spirituel que le dalaï-lama, malgré que l’on retrouve le portrait de ce denier au monastère. Les moines portent fièrement leur habit aux couleurs du drapeau tibétain : le bleu foncé, le pourpre et le jaune. Les temples aussi arborent de magnifiques couleurs. Le Guest House est plutôt rudimentaire mais lorsqu’on paie 175 roupies (4,50$ chambre et repas compris) par jour, on tue l’araignée géante dans la salle de bain et on dit merci.



Le lendemain de notre arrivée, on nous invite à un entretien avec un sage. Ce genre d’opportunité ne se refuse pas. Le moine qui nous lance cette invitation dit en riant : « It will change your life ! » Vous me connaissez, mon jardin spirituel n’est pas très fleuri, faute d’entretien… Qui sait, peut-être la sagesse universelle dort-elle dans ces montagnes depuis des siècles. Prêt à devenir un nouvel homme, je pars à cette rencontre. Nous sommes environ douze occidentaux (aux jardins bien variés). L’enseignement débute en trombe, notre hôte m’a pas ouvert la bouche que j’ai déjà tiré une leçon. L’habit ne fait pas le moine. Non pas qu’il ne soit pas bien vêtu. Je m’imaginais simplement les sages avec plus de rides, plus de cheveux blancs et moins de dents. La discussion qui s’en ai suivi m’a laissé sur mon appétit : il ne sert à rien de pleurer le décès d’êtres chers, le bonheur vient avec le contentement, toutes vies méritent d’être respectées. Les réponses étaient plutôt élémentaires. Je me serais cru devant un énorme biscuit chinois parlant. Peut-être que c’est juste moi qui n’avait pas faim… Peut-être que la sagesse universelle réside justement dans la simplicité.



Les occidentaux qui passent par Menri sont de tout acabit. Il y a les gens comme moi, au jardin frêle, qui viennent simplement à la rencontre d’une nouvelle culture. Appelons-les les senteux. Il y a aussi les égarés, ceux qui sont ici pour trouver des réponses. Ils cultivent leur jardin sans trop savoir comment, ils ont besoin d’être dirigés. Ici, ils constituent le groupe le plus nombreux. Enfin, il y a les habitués, ceux qui sont ici depuis longtemps ou qui reviennent régulièrement. Ils ne viennent pas à Menri pour des vacances mais dans le cadre d’une sérieuse démarche spirituelle, ils sont ici pour travailler sur leur âme. Le dur labeur a probablement produit un magnifique jardin débordant de fleurs, de papillons doux et d’écureuils dansants… Ils adorent parler aux égarés qui boivent leurs paroles sur la méditation, la réincarnation et les traces karmiques. Ils jouissent en expliquant à un senteux que l’assassinat d’une araignée signifie à coup sûr un très mauvais karma. Je vivrai assurément ma prochaine existence sur quatre pattes… Bref, le senteux que j’étais ne s’est pas toujours senti bienvenu dans cet univers mystique. Un système de castes bien différent se fait sentir à Menri. Pourtant, ici comme en Inde, tout le monde partage la même chiotte et ce, quelque soit la beauté de notre jardin…



Chantal, Karine, Annick et moi ne sommes pas les seuls québécois à Menri. Un groupe envoyé par Les Routes du Monde fait également un arrêt au monastère. C’est avec énormément de joie que nous avons accepté de nous joindre à eux afin de visiter l’orphelinat. Imaginez deux-cents garçons vivant dans un immeuble de trois étages. La plupart sont orphelins, les autres n’ont pas vu leur famille depuis des années. Ils viennent parfois d’aussi loin que le Népal pour recevoir une éducation qui pourra constituer une base vers des études supérieures ou vers la vie monastique à Menri, en somme vers un avenir bien meilleur que la plupart des jeunes de leur âge.



La visite de l’orphelinat est organisée depuis plusieurs années et est offerte aux groupes de québécois qui passent par Menri. L‘activité culmine avec un encan fort particulier. Les visiteurs peuvent faire l’acquisition de merveilleux dessins réalisés par les enfants. Pour quelques roupies, voilà une belle façon d’aider à la fois le monastère dans sa mission et également de donner un peu de fierté aux jeunes artistes. Quelques instants avant le début de l’encan, nous pouvons voir les œuvres en enjeu. Un dessin s’est très rapidement distingué des autres, à la fois par ses qualités artistiques et par le sujet traité. C’est celui-ci que je veux, je paierai le prix qu’il faut.



L’encan débute tranquillement, les œuvres d’art s’envolent pour environ 300 roupies (7,50$). L’atmosphère est surchauffée, les enfants jubilent à chaque nouvelle mise. Je me fais discret, désireux de conserver tout mes sous pour l’objet de ma convoitise. Quand le moment arrive enfin, je suis prêt. Définitivement, je ne suis pas le seul intéressé, les offres affluent de toutes parts. Nous passons en vitesse le cap du 400 roupies sous les encouragements des enfants. La course folle prend fin quand, sous l’hystérie générale, j’offre 600 roupies pour obtenir le fameux dessin (je connais un garçon de 7 ans qui sera content !). Peu de temps après, l’encan se termine, près de 200$ ont été amassés, nous prenons quelques photos avec les artistes de nos œuvres respectives. La soirée se clôt par les chants, la farandole, la danse et le spectaculaire mini-trash. Les jeunes garçons sont emballés par notre présence, ça se sent. Maintenant qu’ils me connaissent, je me promets de leur rendre visite à nouveau.



Le lendemain à 6h30, je saute du lit afin de me joindre à la prière matinal. Ils sont tous présent, dans la grande salle de prière, assis sur une des quatre rangées de matelas. En chœur, ils entament des mantras en langue tibétaine pendant près d’une heure. C’est ainsi à chaque jour de l’année (21h00, heure de Montréal pour ceux qui veulent se joindre à eux en pensée). Quelle belle façon de débuter la journée !!! Je quitte donc l’endroit en ayant fait le plein d’énergie et de sourires. Toutefois, je leur fais comprendre que je serai de retour après les classes pour une partie de cricket. Tel que promis, j’étais dans la cour à 16h dans le but de m’amuser un peu. Mais avant de jouer, c’est l’heure du thé. On m’invite à l’intérieur pour partager le fameux chaï. J’entre dans la grande salle à manger, je trouve une place libre et m’assoit. Les enfants sont à la fois surpris et amusé par cette compagnie inhabituelle. Sans dire un mot, nous buvons notre thé, n’échangeant que des regards, des sourires, un instant de pur bonheur. Une fois le bonheur bu, nous partons tous vers l’extérieur, l’heure de la partie de cricket à sonné.

En fait, c’est ce que je croyais !!! Toutefois, j’ai oublié un point important, une petite cour ne permet pas à 200 jeunes de jouer une seule et unique partie de cricket. Voila pourquoi, on assiste à une quinzaine de parties disputées simultanément. Imaginez quinze parties de baseball sur un seul terrain avec des frappeurs aux quatre coins du losange frappant la balle à qui-mieux-mieux. Il ne faut pas être très nerveux pour se promener au centre du terrain alors que les balles filent dans toutes les directions. Je comprends mieux pourquoi certains d’entre eux portent de belles cicatrices derrière la tête… Après quelques élans dignes de Babe Ruth et quelques lancers à la Pascual Perez, j’échange un peu avec les plus vieux qui parle un meilleur anglais avant de quitter pour le souper. La vie est si simple ici au monastère de Menri. Je sens que je pourrais aisément rester quelques jours de plus. Cependant, je ne peux m’y résoudre car je sais très bien que je ne serai plus capable de repartir…

mercredi 17 octobre 2007

Inde - Au revoir Rishikesh !!!

Rishikesh

Mercredi soir dernier, en débarquant de l’autobus, je n’avais qu’une seule envie, aller à la rencontre de Karine, Annick et Chantal, les trois Montréalaises qui font à peu près le même voyage que le mien. Malgré la fatigue, je suis allé à leur hôtel pour les avertir de mon arrivée. Je peux vous dire que ça fait du bien de parler avec des personnes ayant les mêmes références culturelles. Après trois semaines d’anglais (l’habitude était telle que Laurent et moi se surprenions d’utiliser la langue de Shakespeare), ça fait du bien de parler en français. Je peux enfin cesser d’employer cet accent français international qui me permettait de mieux me faire comprendre auprès de mes interlocuteurs, mais qui me donne cette étrange impression d’escamoter une partie de mon identité.



La semaine passée avec les filles à Rishikesh a été fort agréable. Nous avons fait la rencontre de Hari, un Indien de mon âge qui agit comme personne-contact et guide, ici, chez lui à Rishikesh. Sous les bons soins de Hari, nous avons fait des activités diverses. Tout d’abord, nous sommes allés camper sur le bord du Gange. Dans un décor enchanteur, nous avons joué une partie de volleyball de plage et dévoré des ailes de poulet auprès du traditionnel feu de camp.



Surexcité à l’idée de manger de la viande (Rishikesh est une ville sacrée, donc totalement végétarienne), j’ai avalé un morceau de travers. Celui-ci s’est diaboliquement coincé dans mon œsophage. Cette satanée bouchée ne bloquait pas ma respiration mais pire encore, il empêchait l’absorption de nouvelles parties de ce délicieux poulet. Retiré à l’écart avec Ralph (un allemand sensible ma torture), j’ai entrepris toutes sortes de tentatives afin de libérer la voie. Le spectacle était loin d’être joli… Malgré tout, j’ai apprécié la présence rassurante de Ralph à mes côtés. Du moins, jusqu’à ce que sa compassion se transforme en brutales claques dans le dos. Le supplice a duré une bonne demi-heure, suffisamment longtemps pour voir toute la viande disparaitre dans les œsophages libres de mes compagnons de camping.



Une fois le morceau passé, j’ai finalement pu profiter du reste de la soirée. J’y ai fait plusieurs rencontres intéressantes, notamment celles de nombreux québécois envoyés en Inde par les bons soins de Robert. D’abord Maryse, finissante du collège Saint-Paul un an avant moi et qui connaît mon ex Bianca. Ensuite, Gordon, un sympathique enseignant qui entreprend un fantastique tour du monde. Sous la Voie Lactée et les étoiles filantes, lui et moi avons longuement discuté de nos projets respectifs. Je ne suis pas seul à rêver…

Le lendemain matin, après une séance de yoga, j’accepte la folle invitation de Ralph et je saute dans les eaux froides du Gange. Pour lui, c’est clairement un exercice spirituel, pour moi, l’expérience est forte, mais à un autre niveau. Se baigner dans ce fleuve sacré revêt un cachet fort particulier. On ne peut rester totalement indifférent face au passé millénaire du Gange. Pour les hindous, le fleuve est une déesse descendue des cieux pour sauver les hommes. La puissance de Ganga est telle que sa chute aurait causé la destruction de la terre si Shiva n’avait amorti le choc par sa longue chevelure. C’est donc avec un immense respect que nous sommes embarqués sur le raft qui devait nous ramener à Rishikesh. Bel endroit pour mon baptême de rafting… Les vagues immenses et les tourbillons nous ont donné quelques frayeurs mais la déesse a eu la gentillesse d’épargner nos vies.



Quelques jours plus tard, Hari nous invite au cinéma. C’est avec beaucoup d’excitation que j’envisage mon premier film de Bollywood (contraction de Hollywood et de Bombay, lieu de tournage de la plupart des films indiens). Nous allons voir Bhool Balayai, une histoire de maison hantée et de fantômes. L’ambiance dans la salle de projection est totalement survoltée. Les cellulaires raisonnent, les spectateurs parlent entre eux, ils réagissent bruyamment à la moindre blague, à la moindre montée dramatique. Lors des scènes de suspense, ils hurlent dans l’espoir d’effrayer le reste de l’auditoire. Au début du film, les premières apparitions des célébrités déclenchent cris, sifflements et applaudissements. Je n’ai jamais assisté à pareille réaction pour Rémi Girard. Au bout d’une heure et demie, nous avons droit à une intermission afin de nous ravitailler en popcorn et nourritures de toutes sortes. Au bout de trois heures et demi et quelques scènes troublantes alliant mariage et décapitation, le film s’est terminé. Je suis resté un peu sur mon appétit, nous avons eu droit qu’à deux chansons. Il faut préciser que les films indiens regorgent souvent de musique, de danses et de chansons. Hari nous a confirmé que ce n’était pas un Bollywood typique, ce n’est que partie remise…



Je quitte donc Rishikesh avec de merveilleux souvenirs. Cette ville qui m’a si bien réconcilié avec l’Inde et dans laquelle je devenais de plus en plus à l’aise, peut-être trop même. Voilà le signal qui dit au voyageur de poursuivre sa route. Car autant qu’il est agréable de se promener confortablement dans les rues d’une cité apprivoisée, rien ne remplace l’excitation et le plaisir de découvertes ressenti lors de l’exploration de nouveaux chemins. La route se poursuit vers le monastère de Menri, près de Solan, où je projette de passer quelques jours avant d’aller à Shimla.

Chalo, chalo, chalo !!! (Allons-y !)

mardi 16 octobre 2007

Inde - Sur la relativité du temps

Rishikesh

Badrinath, 6h00 : Alba et moi embarquons dans le bus. Nos billets indiquent l’avant dernière rangée, ça risque de brasser.

Badrinath, 6h30 : Après la prière collective, nous partons pour Rishikesh. D’après l’employé au guichet de la station d’autobus, nous devrions arriver vers 17h. Si mes calculs sont exacts, ça fait 10h30 d’autobus…

Encore à Badrinath, 6h31 : Tout le monde dort dans le bus, tout le monde sauf un vieil homme assis en avant de nous. C’est un prêtre aux cheveux blancs et aux vêtements orangés. Il parle si fort à son voisin que même le chauffeur doit l'entendre. Heureusement, je ne comprends pas l’hindi, je peux donc tenter de sommeiller.

Près de Josimath, vers 9h00 : Je m’aperçois que je n’ai toujours pas dormi. La route est beaucoup trop sinueuse et raboteuse pour se reposer. Le vieil homme parle encore. Alba et moi doutons qu’il ait eu le temps de respirer depuis notre départ.

À quelque part entre Badrinath et Rishikesh, vers 10h : Je songe à contacter le livre des records Guinness pour cataloguer le plus long monologue de l’histoire quand tout à coup, un homme derrière nous (logiquement à la dernière rangée), ose interrompre le verbomoteur. Le monologue devient alors dialogue.

Toujours à quelque part entre Badrinath et Rishikesh, vers 11h30 : La conversation entre les deux hommes tient toujours et les échanges deviennent de plus en plus virulents. Malheureusement, je ne comprends pas l’hindi, car j’aimerais bien connaître l’enjeu du débat.

À mi-chemin entre Badrinath et Rishikesh, vers 12h30 : Nous somme officiellement coincés en pleine troisième guerre mondiale. Le ton monte, les belligérants se multiplient, l’autobus est le théâtre d’une violente joute oratoire. SI au moins, je saisissais le propos, ça passerait le temps.

À quelque part où j’ai faim, vers 13h00 : L’homme assis derrière nous explique dans un anglais approximatif que le sujet du débat est l’environnement. Dans un anglais beaucoup trop approximatif, il nous explique les positions de chacun. Je n’y comprends strictement rien, pourtant, ce n’est pas de l’hindi.

Je me fous de savoir où on se trouve, pourvu qu’on s’arrête pour manger et pour enfin s’échapper de cette discussion qui n'en finit plus, vers 13h30 : Le bus arrête devant un petit restaurant, c’est la délivrance !

Dans un restaurant sur le bord de la route, vers 14h00 : Alba et moi mangeons tranquillement notre repas. Le bonheur est temporaire, le chauffeur a fini son chaï (le thé indien), tout le monde doit embarquer dans le bus, on repart.

Au milieu de nul part, vers 15h00 : L’autobus s’immobilise. Il n’y a pas de véhicule devant. Dieu merci ce n’est pas un glissement de terrain. À l’arrière, une voiture de police. Non, c’est pas sérieux !!! Le conducteur de l'autobus a enfreint un quelconque règlement de la route, et nous voilà paralysés pour environ une demi-heure.

Toujours au milieu de nulle part, vers 15h30 : Nous repartons. Je demande au contrôleur de l’autobus vers quelle heure nous arriveront à Rishikesh. Il me répond vers 18h. Il ne reste plus que deux heures et demi…

Encore loin de Rishikesh, vers 17h00 : C’est la quatrième fois que je prends cette fameuse route 58. Je commence à connaître certains repères et je doute que nous arriverons à 18h. Je pose la question à un passager qui estime que nous serons à Rishikesh à 19h30…

Je ne sais plus où nous sommes, vers 18h00 : Le soleil se couche rapidement. Rouler en autobus dans le noir, c’est dangereux. Toutefois, c’est beaucoup plus reposant car tous les passagers dorment profondément, même le vieux monsieur aux cheveux blancs.

En enfer, vers 19h30 : À la vitesse où nous roulons, je me demande vraiment si nous nous approchons ou si nous nous éloignons de Rishikesh. L’inconfort de mon siège m’a fait perdre la raison. Je jure de ne plus reprendre le transport public d’ici au moins une semaine…

À Rishikesh, 20h24 : Après 14 heures et demi passé dans cet autobus, j’en sors complètement épuisé.

Rishikesh, 20h25 : Finalement, ça s’est bien passé, nous avons atteint notre destination dans la même journée. C’est quand que je repars ?

mercredi 10 octobre 2007

Inde - Souvenirs d'enfance 3

Badrinath

Lors de ce périple en montagnes, j’ai poursuivi mon projet Souvenirs d’enfance. J’y ai pris quelques superbes photos d’enfants.

















mardi 9 octobre 2007

Inde - Quand les fous changent d'idee (suite)

Badrinath

Prêts pour la suite de cette histoire ? Juste pour vous remettre dans le bain, moi et mes trois nouveaux copains de voyage étions forcés de dormir dehors à cause d’un immense glissement de terrain. Le lendemain, après 24 heures d’attente et plusieurs faux espoirs de réouverture, la voie est libre (l’utilisation du singulier est ici parfaitement justifiée). Il nous faut maintenant trouver un autobus qui veut bien nous mener à Govindghat. Pas d’inquiétudes, cinq minutes plus tard, nous sommes confortablement assis dans un bus à facture plutôt moderne et avec seul compagnon de route le chauffeur et un jeune homme. Pour les deux heures qui nous restent à parcourir, nous avons un autobus à nous seuls. Quelque chose me dit que cela ne se reproduira pas souvent… surtout pas en Inde.

Le village de Govindghat n’est pas particulièrement intéressant. Nous y restons qu’une seule nuit avant de repartir aussitôt, sacs au dos, pour une longue montée de 14 kilomètres vers un autre village nommé Ghangaria. Une journée éreintante, j’ai presque tout mon équipement sur le dos et la fin du trajet se déroule sous une pluie battante et un peu de grêle ! C’est avec beaucoup de bonheur et de soulagement que nous sommes enfin arrivés dans ce bled perdu, point de départ de nombreux treks. À Ghangaria, c’est pas compliqué, on gèle. L’humidité et le froid sont tels que tous les villageois s’apprêtent à quitter l’endroit. Notre chambre non chauffée, l’inexistence d’eau chaude (même tiède), la gigantesque araignée dans la chambre, les visites répétées de Stinky Lola (notre souris favorite) et son attaque contre Alba, les restaurants sans porte et fenêtre malgré le froid de loup, tout ça n’aide en rien à rendre l’endroit chaleureux. Toutefois, nous apprenons une excellente nouvelle, la Vallée des Fleurs ainsi que le trek de l’Hem Kund sont toujours accessibles. Une autre belle preuve qu’on peut rarement se fier aux informations indiennes.





Le lendemain matin, nous partons pour la fameuse vallée. Une randonnée assez facile mais ô combien fantastique. La vallée est tout simplement grandiose, elle est entourée de plusieurs montagnes dépassant les 6000 mètres d’élévation. Comme son nom l’indique, elle abrite une étonnante variété de fleurs. Même si l’automne n'est pas la meilleure saison afin d’admirer la floraison, nous constatons tout de même la présence de quelques espèces et nous humons de merveilleux parfums tout au long de la randonnée. Il a bien fallu quitter ce paysage idyllique et revenir au village totalement déserté par la population locale et par la poignée sikhs qui profitent du dernier jour d’ouverture de leur temple au lac sacré d’Hem Kund.




C’est d’ailleurs à cet endroit que nous partons dès le lendemain. Alba ne se sentant pas bien, nous sommes trois à grimper les 1250 mètres de dénivelés qui nous séparent du lac sacré. Le chemin pour y arriver est ardu. On se croirait dans une interminable partie de Donkey Kong (les barils et le singe en moins). On monte en zigzaguant sans jamais voir la fin. Les quelques personnes que l’on croise sont des ouvriers népalais qui travaillent sur la route de pierres et des sikhs qui redescendent après avoir fermé le temple pour l’hiver. Pas un seul d’entre eux n’oublie de nous en faire la remarque, ne pouvant probablement pas imaginer une seconde que l’on puisse faire cette ascension difficile sans vouloir entrer dans le temple.



Parlons-en de ce temple ! Car oui, nous l’avons finalement atteint. Le site naturel est magnifique. Le lac, grand comme un terrain de football (football canadien pour être plus précis) est entouré de hauts pics enneigés. Le temple quant à lui (que mes amis sikhs me pardonnent), ressemble à un gros comptoir de crème glacé fait de ciment et de tôles. Les sikhs ne semblent pas faire de liens entre beauté et sacré. Peut-être est-ce tout à leur honneur… Malgré le fait que ce temple, entouré de déchets puants, cache la vue de ce qui pourrait être le plus beau panorama de la région, il ne réussit pas à ruiner complètement la beauté des lieux. Le sacré ici ne repose pas dans ce temple mais dans l’imposante nature qui l’entoure, peut-être que les sikhs l’ont compris mieux que nous… En redescendant, nous avons pu profiter des fabuleux paysages et de la gentillesse des ouvriers népalais avec lesquels nous avons partagé le thé et les biscuits. Afin de clore ce chapitre, je me permets un conseil, ne descendez pas trop vite une dénivellation de 1250m, votre tête pourrait exploser !



Ok, mettons quelque chose au clair, quand ça fait quatre jours que tu marches quotidiennement près de 14 kilomètres en montagne, ton corps te donne certains signaux. D’abord, dès le second jour, à la Vallée des Fleurs, mon petit orteil du pied gauche a commencé à montrer des signes de faiblesse. Le troisième jour, je viens de vous en parler, c’est la tête qui a très mal réagit au changement brusque d’altitude. Quatrième jour, je vous laisse deviner la partie du corps qui m’a fait souffrir. Premier indice, c’est pas mal à mi-chemin entre la tête et le petit orteil… Deuxième indice : Connaissez-vous la chanson « The house, the house, the house is on fire » ? Subitement, ma démarche est celle d’un joueur de football de l’université McGill suite à son initiation. Bref, j’espère que demain le feu sera éteint.



Nous sommes maintenant à Badrinath, ville reculée dans les montagnes. Ce matin, nous avions espoir de dormir un peu. Les trois dernières nuits ont été écourtées par des bruits et ce, dès 5h30 du matin. Que ça soit à cause de la construction ou d'une meute de jeunes étudiants indiens, dormir le matin s’est récemment avéré impossible. L’ashram (sorte d’hôtel communautaire, je simplifie) dans lequel nous passons la nuit à vraiment l’air d’un endroit parfait pour le repos, la méditation et pour les discours de Gandhi à 6h30 du matin !!! Quoi de mieux que de se réveiller abruptement sous les sages paroles du Mahatma claironnées par de puissants haut-parleurs. Décidément, l’Inde n’a pas fini de m’étonner.



Aujourd’hui, nous sommes allés faire un tour dans un charmant village tibétain. Mana est à moins de cent kilomètres de la frontière tibétaineet constitue le dernier village au bout de la route indienne. Le Lonely Planet avait raison de recommander cet endroit. Les majestueuses montagnes qui l’entourent, les minuscules ruelles qui séparent les maisons faites de pierres, les portes et les fenêtres en bois sculpté, les vêtements et les sourires traditionnels des villageois, tout cela fait de Mana une destination unique, un monde différent à l’intérieur de l’Inde. Évidemment, ça me donne le goût de tenter ma chance au Tibet, dans quelques mois. Pour l’instant, je retourne à Rishikesh avec Alba dès demain matin.





C’est avec un petit pincement au cœur que je laisse derrière Kendall et Laurent. Ils demeurent dans la région encore quelques jours afin de faire de la randonnée. Le quatuor se sépare en deux. Nous avons eu tellement de plaisir cette semaine !!! J’espère sincèrement que le destin nous permettra de nous revoir plus loin sur la route. Alba et moi devons retourner à Rishikesh. J’espère vraiment pouvoir rejoindre Karine, Annick et Chantal, mes trois amies de Montréal. Je n’ai pas de nouvelles récentes d’elles car depuis une semaine, je n’ai aucun accès internet. J’ai vraiment hâte de connaître leurs premières impressions de l’Inde.